Bangkok, 19 juin 2025 — Une simple conversation téléphonique, censée rester confidentielle, a plongé le pouvoir thaïlandais dans l’embarras. La Première ministre Paetongtarn Shinawatra, héritière d’une dynastie politique aussi puissante que controversée, est depuis mercredi au cœur d’une tempête politique, après la fuite d’un enregistrement de son échange privé avec l’ancien Premier ministre cambodgien Hun Sen.
Dans cet appel, qui s’est rapidement retrouvé entre les mains de la presse et sur les réseaux sociaux, la cheffe du gouvernement adopte un ton jugé trop conciliant envers Phnom Penh, notamment sur les questions frontalières et les projets d’investissement conjoints dans les zones économiques sensibles. Si rien dans le contenu ne semble constituer une faute diplomatique manifeste, c’est le climat de suspicion et le contexte politique qui donnent à cette fuite un parfum de scandale.
Face à la polémique, Paetongtarn a choisi la voie de l’apaisement. Flanquée de plusieurs ministres et de hauts gradés militaires, elle a présenté ses excuses lors d’une conférence de presse exceptionnelle à Bangkok :
« Je reconnais que la forme de cet échange peut prêter à confusion. Je n’ai jamais eu l’intention de compromettre notre souveraineté ni de négocier en dehors du cadre institutionnel. »
Mais les excuses ne suffisent pas à éteindre l’incendie. L’opposition réclame l’ouverture d’une enquête parlementaire sur une possible atteinte aux intérêts nationaux. Certains élus dénoncent déjà une « diplomatie parallèle », tandis que d’autres soupçonnent une instrumentalisation politique de cette fuite, sur fond de rivalités internes à l’appareil sécuritaire.
Selon des sources proches du ministère de la Défense, l’appel aurait été intercepté via un canal de communication militaire. Si l’armée n’accuse personne publiquement, les regards se tournent vers certains cercles conservateurs, toujours méfiants envers la famille Shinawatra, régulièrement accusée de vouloir réduire l’influence des élites militaires dans la conduite des affaires de l’État.
À l’international, la fuite inquiète également. Elle fragilise la posture régionale de la Thaïlande, qui tente d’apparaître comme un acteur pivot au sein de l’ASEAN. Les partenaires diplomatiques, tout comme les investisseurs, observent avec prudence cette séquence qui met en lumière les tensions persistantes entre l’administration civile et l’appareil militaire.
Pour Paetongtarn Shinawatra, cette affaire arrive à un moment critique. Engagée dans un programme de réformes économiques et d’ouverture régionale, elle doit désormais composer avec une légitimité affaiblie et une majorité sous pression. La moindre erreur de communication pourrait se transformer en crise d’État.