La capitale du Darfour-Nord, El-Fasher, vit une crise humanitaire d’une gravité extrême. Selon un responsable du ministère de la Santé, au moins 63 personnes, majoritairement des femmes et des enfants, sont mortes de malnutrition aiguë entre le 3 et le 10 août 2025. Ce bilan ne concerne que les cas ayant pu atteindre les hôpitaux, tandis que de nombreuses familles inhumant leurs proches sans soins, en raison de l’insécurité et du manque de moyens de transport, restent invisibles dans les statistiques officielles.
Assiégée depuis plus d’un an par les Forces de soutien rapide (FSR), opposées à l’armée soudanaise depuis avril 2023, El-Fasher est la dernière capitale régionale du Darfour encore contrôlée par le gouvernement. Complètement isolée, la ville subit une pénurie alimentaire catastrophique : les marchés sont vides, les denrées rares et hors de prix. Le prix d’un sac de 100 kg de farine de millet a explosé, atteignant désormais 11 millions de livres soudanaises, soit environ 1600 euros.
Les enfants paient un lourd tribut à cette crise. Le Programme alimentaire mondial (PAM) estime que 40 % des moins de cinq ans souffrent de malnutrition aiguë, dont 11 % dans sa forme la plus sévère. Dans les cantines populaires, la ration quotidienne, autrefois partagée entre trois personnes, est désormais divisée entre sept. Faute de farine de mil ou de maïs, certains centres utilisent même des résidus de tourteaux destinés au bétail, un recours désespéré.
Face à cette situation dramatique, des familles sont contraintes à des mesures extrêmes. Hachim Haroune, père de sept enfants, témoigne : « Ma femme prépare un plat à base de résidus de tourteaux que les enfants consomment le soir avant de dormir. » À l’hôpital d’El-Fasher, les stocks médicaux s’amenuisent dangereusement. Une pédiatre alerte : « La plupart des enfants présentent une malnutrition aiguë dès leur admission. Sans une aide urgente, nous serons impuissants face à cette catastrophe. »
L’acheminement de l’aide est entravé par les combats, les routes bloquées et la saison des pluies qui bat son plein en août. Ce conflit, qui dure depuis plus de deux ans, a déjà causé des dizaines de milliers de morts et déplacé des millions de personnes, générant ce que l’ONU qualifie de « pire crise humanitaire au monde ». Sur l’ensemble du territoire soudanais, près de 25 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire aiguë, un chiffre dramatique qui reflète l’urgence d’une intervention internationale salvatrice.