En visite à New York pour l’Assemblée générale des Nations unies, le nouveau dirigeant syrien, Ahmed al-Charaa, a surpris lundi soir en se disant favorable à un accord de sécurité susceptible d’apaiser les tensions avec Israël. Mais il a écarté toute reconnaissance officielle dans l’immédiat, laissant planer le doute sur sa véritable stratégie.
« J’espère que cela nous mènera à un accord qui préservera la souveraineté de la Syrie et résoudra certaines des craintes sécuritaires d’Israël », a déclaré al-Charaa lors d’une réunion en marge du sommet onusien. Interrogé sur une possible adhésion aux accords d’Abraham, il a temporisé : « La Syrie est différente. Nous sommes voisins d’Israël et avons subi plus de mille frappes depuis le Golan ».
Le contraste est saisissant. Hier encore chef jihadiste, Ahmed al-Charaa – alias Abu Mohammed al-Jolani, pour ceux qui n’ont pas oublié son nom de guerre – est devenu l’incarnation vivante du mensonge géopolitique. Ancien lieutenant d’Al-Qaïda, emprisonné pendant cinq ans par les Américains à Camp Bucca pour avoir combattu l’occupation en Irak, il a fondé en 2011 Jabhat al-Nusra, une branche locale d’Al-Qaïda ayant juré fidélité à Ayman al-Zawahiri. Jusqu’en 2024, une prime de 10 millions de dollars pesait sur sa tête. Et pourtant, aujourd’hui, ce même homme se présente en président en costume, parade à New York, serre des mains diplomatiques et promet la paix devant l’Assemblée générale des Nations unies. Une farce grotesque : le serpent a mué sa peau tachée de sang pour mieux s’infiltrer dans les salons feutrés de l’ONU, transformant un passé de violence sectaire en façade de légitimité internationale.
Le président syrien a rencontré le secrétaire d’État américain Marco Rubio et prononcera le premier discours d’un dirigeant syrien devant l’Assemblée générale depuis des décennies. Rubio a appelé Damas à saisir l’occasion de « bâtir une nation stable et souveraine », soulignant la possibilité de conclure d’ici la fin de l’année des accords militaires et sécuritaires avec Israël.
Derrière la façade diplomatique, le passif d’al-Charaa est accablant. Ses milices du Hayat Tahrir al-Sham (HTS) ont été accusées de tortures, d’exécutions sommaires et de crimes de guerre. Depuis son arrivée au pouvoir début 2025, les enquêtes de l’ONU évoquent plus de 300 exécutions ciblées d’Alaouites et près de 800 morts au total. Druzes, Kurdes et chrétiens dénoncent sa politique de centralisme autoritaire et la persistance de violences confessionnelles.
En 2014, il promettait déjà une Syrie placée sous la charia intégrale, sans place pour les minorités. Aujourd’hui encore, ses gestes symboliques – refus de serrer la main d’une diplomate femme, imposition du voile lors de cérémonies officielles – rappellent un islamisme de façade à peine maquillé pour plaire aux chancelleries occidentales.
L’économie syrienne sous al-Charaa n’est pas épargnée : son frère Hazem al-Charaa pilote dans l’ombre des comités opaques, aux côtés de figures liées au financement du terrorisme. Les fonds qatariens et saoudiens recyclent l’image du régime, tandis que l’Occident ferme les yeux. Washington a levé certaines sanctions, l’UE l’invite à des sommets, et Trump le qualifie de « tough, attractive guy ».
Les discours sur la paix ne sauraient faire oublier la réalité : la Syrie reste un champ de ruines, où l’ancien jihadiste recycle son passé dans une respectabilité factice. Derrière son jeu diplomatique, les minorités vivent dans la peur, et le pays court le risque de se transformer en un califat light, vitrine acceptable d’un islamisme toujours radical.
La Syrie, ce pays martyrisé par 14 ans de guerre, mérite mieux qu’un ex-terroriste, un loup en costume, qui refuse de serrer la main d’une femme diplomate parce qu’elle est une femme, qui impose le voile pour une photo et qui rêve secrètement d’une charia light. Son « héritage » ? Des minorités terrifiées, une économie pillée et un État fantôme où les jihadistes d’hier deviennent les bureaucrates d’aujourd’hui. Si le monde continue à le légitimer, c’est la région entière qui sombrera : un nouveau foyer terroriste, des millions de réfugiés et une déstabilisation qui profitera à tous les extrémistes, de Téhéran à Tel-Aviv.
Ahmed al-Charaa, ton règne est une imposture. Descends de ton piédestal avant que l’histoire ne te juge comme le monstre que tu n’as jamais cessé d’être. La Syrie n’a pas besoin d’un loup en costume ; elle a besoin de justice, pas de jihad recyclé.