La Somalie s’apprête à vivre un moment historique avec l’organisation, le 25 décembre 2025, des premières élections locales au suffrage universel direct dans la région de Banadir, incluant la capitale Mogadiscio. Ce scrutin marque une rupture avec des décennies de système politique indirect basé sur les clans, et représente une étape cruciale dans la transition démocratique du pays, promise par le président Hassan Sheikh Mohamud depuis son élection en 2022.
Pour assurer la sécurité de ce processus électoral sensible, les autorités somaliennes ont massivement renforcé leurs dispositifs. Le ministre de la Sécurité intérieure, Abdullahi Sheikh Ismail, a annoncé le déploiement de plus de 10 000 membres des forces de sécurité dans la capitale. « Nous sommes parvenus à sécuriser la ville », a-t-il déclaré dans un communiqué officiel, soulignant les efforts intensifs pour prévenir toute perturbation, notamment de la part des insurgés shebabs d’Al-Chabab, qui continuent de menacer la stabilité du pays.
Le président de la Commission électorale nationale indépendante (NIEBC), Abdikarim Ahmed Hassan, a détaillé les mesures logistiques exceptionnelles : la circulation sera strictement restreinte le jour du vote, et les électeurs seront transportés vers les bureaux de vote par des bus organisés. « Le pays tout entier sera bouclé. C’est un grand moment pour le peuple somalien, qui assiste à des élections directes pour la première fois en près de soixante ans », a-t-il affirmé, capturant l’enthousiasme mais aussi la tension entourant cet événement.
Ces élections interviennent après plusieurs reports – initialement prévues pour juin 2025, elles ont été repoussées à plusieurs reprises en raison de défis sécuritaires et logistiques. Environ 400 000 électeurs ont été inscrits lors d’une campagne d’enregistrement lancée plus tôt dans l’année, un processus inédit depuis des décennies. Plus de 1 600 candidats se disputent les 390 sièges des conseils locaux dans la région de Banadir, reflétant une compétition vive pour ces postes influents au niveau municipal.
Cependant, ce scrutin n’est pas exempt de controverses. L’opposition a boycotté le processus, dénonçant des « procédures électorales unilatérales » imposées par le gouvernement fédéral. Des leaders opposants, dont d’anciens présidents, critiquent le manque de consensus inclusif et craignent que ces réformes exacerbent les divisions politiques dans un pays encore marqué par l’instabilité.
Historiquement, le suffrage universel direct avait été pratiqué en Somalie jusqu’en 1969, avant d’être aboli sous le régime autoritaire de Mohamed Siad Barre. Après la chute de ce dernier en 1991, plongeant le pays dans une guerre civile prolongée, le système politique s’est reposé sur un modèle indirect complexe, où les clans jouaient un rôle central dans la sélection des représentants. Ce mécanisme, souvent source de tensions et de corruption, a été critiqué pour avoir favorisé les divisions et permis aux groupes extrémistes comme Al-Chabab de prospérer.
La Somalie, encore fragilisée par des décennies de conflit, une insurrection islamiste violente et des catastrophes naturelles répétées, espère que ce processus électoral constitue une étape clé vers une transition démocratique durable. Le pays prévoit également l’organisation d’élections législatives et présidentielles en 2026, à la fin du mandat du président Hassan Sheikh Mohamud.


























