Depuis le début de l’offensive turque contre les Kurdes de Syrie, les Européens craignent l’évasion des 12 000 djihadistes détenus dans des centres contrôlés par les Kurdes. Ce jeudi, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a rencontré à Bagdad les autorités irakiennes pour les transférer dans des prisons irakiennes et les empêcher de réintégrer le groupe terroriste État islamique.
«Il y a des combattants étrangers de plus de 72 pays. Ils se trouvent dans des camps et des prisons supervisés par les Forces démocratiques syriennes (dirigées par les Kurdes). Nous devons être vigilants pour maintenir la sécurité », a déclaré Jean-Yves Le Drian lors d’une conférence de presse à Bagdad avec son homologue irakien, Mohamed Ali Al Hakim.
Les pays européens tentent de mettre en œuvre un plan visant à transférer les combattants de l’État islamique des prisons et des camps syriens en Irak afin d’empêcher les djihadistes de rentrer en Europe à la suite du récent conflit à la frontière syro-turque.
En plus de garder des milliers de djihadistes de l’État islamique dans leurs prisons, l’Irak sera également chargé de les juger. Le Drian a souligné qu’il avait évoqué avec les dirigeants irakiens « la manière de mettre en oeuvre un mécanisme juridictionnel adapté » pour juger « dans les meilleures conditions » les combattants « , y compris les Français. »
Jusqu’à présent, 14 Français ont été condamnés par des tribunaux irakiens pour avoir intégré Daesh. Douze d’entre eux ont été transférés des prisons kurdes en Syrie à Bagdad. 11 ont été condamnés à la peine de mort et trois, dont deux femmes, à la réclusion à perpétuité. La justice irakienne a condamné à la peine capitale des centaines de membres de l’État islamique, y compris de nombreux étrangers, mais n’a pas encore été exécutée. L’Iraq avait déjà proposé en avril dernier de juger tous les djihadistes détenus en Syrie devant les tribunaux irakiens en échange de 2 000 millions de dollars.
« Il y a des négociations entre Américains, Britanniques, Français et Irakiens sur le financement et la construction de prisons », explique-t-il à l’agence de presse française AFP Hicham al-Hachemi, spécialiste des mouvements djihadistes.Il y a déjà eu des fuites de djihadistes ces derniers jours
Le Drian tente de ne pas s’alarmer de la crainte que les terroristes de l’État islamique ne profitent de l’opération turque pour s’échapper du Kurdistan syrien et s’assure que la situation est actuellement sous contrôle. Cependant, deux djihadistes belges se sont échappés d’une prison et le Conseil de sécurité de l’ONU a mis en garde cette semaine contre le « risque de dispersion » des djihadistes.
Selon les autorités kurdes, environ 800 personnes se sont échappées dimanche dernier d’un camp situé à Ain Issa, au nord de Raqqa, où des proches de membres de l’État islamique sont enfermés. Certains sont rentrés mais d’autres ont réussi à rejoindre la Turquie, ont indiqué les mêmes sources.
À l’instar d’autres pays européens, la France refuse le rapatriement de ses compatriotes qui se trouvent actuellement dans des camps ou des prisons sous contrôle kurde. Il y aurait environ 200 adultes et 300 enfants. Les femmes des combattants pourraient également être transférées en Irak et jugées là-bas, le gouvernement français les considérant également comme radicalisées. Les familles réclament en vain leur rapatriement en France.