Le président de la République a atterri ce mercredi 3 décembre 2025 à Pékin pour sa quatrième visite d’État en Chine, dans un climat diplomatique et commercial particulièrement tendu. Accueilli à 17 heures locales par le ministre des Affaires étrangères Wang Yi, Emmanuel Macron a immédiatement affiché la tonalité de ce déplacement : « Merci pour votre accueil et pour le travail que nous allons accomplir ensemble. »
Accompagné de son épouse Brigitte Macron, de six ministres — Affaires étrangères, Économie, Finances, Agriculture, Transition écologique et Culture — et d’une délégation de trente-cinq chefs d’entreprise, représentant Airbus, EDF, Danone ainsi que des PME du luxe et de l’agroalimentaire, le chef de l’État entend, selon l’Élysée, « faire respecter l’Europe comme un partenaire majeur de la Chine » et poser les bases d’un « partenariat plus équilibré ».
Le programme mêle symboles culturels et discussions de fond. Après la visite du jardin Qianlong, fraîchement restauré au cœur de la Cité interdite, et un dîner officiel, Emmanuel Macron s’entretiendra jeudi avec Xi Jinping au Palais du Peuple, avant une rencontre plus détendue vendredi à Chengdu, dans le Sichuan. L’agenda prévoit la visite d’un centre de recherche sur le panda géant — deux spécimens viennent de revenir de France, deux autres y seront bientôt envoyés — ainsi que le site historique du barrage de Dujiangyan.
La guerre en Ukraine domine l’agenda politique. Face à la posture chinoise — neutralité affichée mais soutien logistique indirect à Moscou et achats massifs d’hydrocarbures russes — Paris souhaite convaincre Pékin d’utiliser son influence pour obtenir un cessez-le-feu. Peu d’observateurs croient à une percée immédiate, mais la France, qui présidera le G7 en 2026, entend maintenir la pression. Macron espère exploiter l’alliance sino-russe, dans l’espoir de réaliser une percée diplomatique malgré les limites de l’optimisme.
Côté commerce, le constat est sévère : le déficit bilatéral français a doublé en dix ans, atteignant 47 milliards d’euros en 2024. L’Europe accuse la Chine de distorsions de concurrence, notamment via des subventions aux véhicules électriques et aux technologies vertes. Les enquêtes antidumping chinoises sur le porc, les produits laitiers et certaines eaux-de-vie françaises — ouvertes en riposte aux droits de douane européens — pèsent sur les discussions. Paris espère obtenir des exemptions comparables à celle obtenue pour le cognac en juillet dernier.
Le secteur de l’énergie constitue un autre enjeu majeur, avec la transition verte comme priorité, tout en restant fortement dépendant des terres rares chinoises, qui représentent 80 % du marché mondial. La coopération devrait se concentrer sur le développement des énergies renouvelables et sur le rééquilibrage des flux d’investissements, actuellement de 46 milliards d’euros de la France vers la Chine contre 12 milliards dans l’autre sens.
Dans l’aéronautique, la France entretient des partenariats solides avec Airbus, mais fait face à une concurrence chinoise croissante. Des accords bilatéraux sont envisagés pour favoriser les co-investissements et faciliter les transferts technologiques, renforçant ainsi la compétitivité française sur le marché chinois.
Enfin, le commerce général entre les deux pays reste marqué par un déficit commercial de 47 milliards d’euros et par les subventions chinoises aux véhicules électriques. La France, en coordination avec l’Union européenne, défend la mise en place d’un « accès équitable » et appelle à un dialogue constructif afin de corriger ces distorsions et de rééquilibrer les relations économiques bilatérales.
La France plaidera pour la libération de la défenseure tibétaine Zhang Yadi et abordera les pratiques de la plateforme SHEIN, actuellement dans le collimateur européen pour la vente de produits illégaux.
Malgré ces frictions — Ukraine, Taïwan (évoqué en marge), droits de l’homme, concurrence déloyale — plusieurs accords bilatéraux devraient être signés jeudi, notamment en matière agroalimentaire, énergétique et culturelle. Les pandas, souvent symboles d’amitié, joueront une fois encore ce rôle, masquant en partie la réalité des rapports de force.
En pleine dernière ligne droite de son second mandat, Emmanuel Macron tente de positionner la France comme un pont entre l’Occident et une Chine affirmant pleinement sa puissance globale. Les résultats concrets sur l’Ukraine demeurent incertains, tandis que le rééquilibrage économique s’annonce comme un chantier de longue haleine.
L’Élysée martèle : « L’Europe doit être respectée comme un grand partenaire. » Reste à savoir si Pékin est prêt à entendre ce message.


























