Lors de la réunion du Conseil des ministres tenue ce dimanche 14 décembre 2025, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a placé la transparence commerciale au cœur de ses priorités en la qualifiant d’« objectif prioritaire et véritable aboutissement du processus de numérisation et du commerce électronique ». Cette déclaration intervient dans un contexte où l’Algérie accélère sa transition numérique, faisant du développement du commerce en ligne un levier stratégique pour moderniser l’économie nationale.
Après avoir suivi un exposé détaillé sur la stratégie nationale de développement du commerce électronique, le chef de l’État a insisté sur le fait que ce secteur représente « un défi économique majeur ». Il a appelé à une mobilisation collective de tous les acteurs concernés – ministères, entreprises, startups et citoyens – pour assurer le succès de cette transformation. « Le commerce électronique constitue un défi important, qui requiert la participation de tout un chacun pour atteindre cet objectif économique, à travers l’utilisation des moyens nécessaires », a-t-il déclaré, selon le communiqué officiel du Conseil des ministres.
Parmi les axes prioritaires soulignés par le président Tebboune figure la garantie de la sécurité numérique, un enjeu crucial dans un monde où les cybermenaces sont en constante évolution. Il a également plaidé pour l’octroi de « davantage de facilitations » aux opérateurs économiques et pour un encouragement actif des activités commerciales en ligne. Ces mesures visent non seulement à stimuler la croissance du e-commerce, mais surtout à instaurer une transparence totale dans les transactions, éliminant ainsi les zones d’ombre qui favorisent parfois la fraude ou les pratiques opaques.
Cette vision s’inscrit dans la continuité des engagements du président Tebboune en faveur de la numérisation comme outil de gouvernance moderne. Depuis plusieurs années, l’Algérie multiplie les initiatives pour digitaliser les services publics et privés : interconnexion des bases de données fiscales, plateformes de paiement électronique sécurisées, hébergement de données sur des clouds nationaux, et renforcement du cadre légal pour les transactions en ligne. La transparence commerciale, via le numérique, permettrait de tracer les flux de marchandises, de réduire les interventions humaines susceptibles de corruption, et de fournir des données précises et en temps réel aux autorités comme aux consommateurs.
Le commerce électronique en Algérie connaît déjà une croissance exponentielle. Avec un marché estimé à plus de 1,5 milliard de dollars en 2024 et des projections dépassant les 2 milliards en 2025, le secteur bénéficie d’une population jeune et connectée – près de 77 % des Algériens ont accès à Internet. Des plateformes locales émergent, soutenues par des investissements dans la 5G, la fibre optique et la formation aux métiers du numérique.
Parallèlement à ces orientations sur le e-commerce, le Conseil des ministres a adopté d’autres mesures sociales et administratives significatives, comme la revalorisation des pensions de retraite (10 % pour les pensions inférieures ou égales à 20 000 DA, et 5 % au-delà), l’interdiction des démolitions de constructions illicites en hiver, et la création de nouvelles circonscriptions administratives à Maghnia et El Eulma. Ces décisions illustrent une gouvernance axée sur le pouvoir d’achat, la justice sociale et l’efficacité administrative.
Cependant, malgré ces ambitions louables et les progrès indéniables, cette stratégie soulève quelques interrogations critiques quant à sa mise en œuvre effective. Si la transparence est présentée comme l’aboutissement ultime de la numérisation, les retards persistants dans les projets de digitalisation – comme l’interconnexion des bases de données ministérielles ou la réalisation du Data Center national – risquent de freiner cette dynamique. L’Algérie reste classée modestement dans les indices internationaux d’e-gouvernance (autour de la 112e-116e place), en raison de lenteurs bureaucratiques, d’un manque de coordination entre secteurs et d’une fracture numérique marquée, particulièrement en zones rurales où l’accès à un internet haut débit fiable reste limité.
De plus, des défis structurels subsistent pour le e-commerce : une logistique encore insuffisante, une persistance du paiement en cash qui limite la traçabilité, un déficit en équipements de paiement électronique pour les commerçants, et une dépendance aux technologies étrangères qui pose des questions de souveraineté numérique et de cybersécurité.
Bien que la numérisation soit vantée comme un remède à la corruption et à l’informel, son succès dépendra d’une réelle mobilisation des moyens et d’une accélération concrète, sous peine de voir ces objectifs rester des déclarations d’intention face à une réalité terrain plus complexe.
En misant sur la transparence via le numérique, l’Algérie ambitionne non seulement de rattraper son retard en matière de commerce en ligne, mais aussi de poser les bases d’une économie digitale inclusive, sécurisée et transparente. Ce chantier, s’il est mené avec la mobilisation requise et en surmontant les obstacles identifiés, pourrait transformer profondément le paysage économique du pays dans les années à venir.


























