Le Nigeria, géant démographique et économique de l’Afrique de l’Ouest avec ses 230 millions d’habitants, est une nouvelle fois plongé dans l’horreur. Le 22 novembre 2025, plus de 300 élèves et enseignants ont été enlevés dans une école catholique de l’État de Niger, marquant la deuxième attaque majeure de la semaine après un assaut meurtrier contre une église. Parmi les victimes, 50 élèves ont réussi à s’échapper et ont retrouvé leurs familles entre vendredi et samedi, selon l’Association chrétienne du Nigeria (CAN).
Face à cette tragédie, le pape Léon XIV a lancé un appel pressant pour la libération immédiate des élèves et enseignants. « J’ai appris avec une immense tristesse l’enlèvement de prêtres, de fidèles et d’élèves au Nigeria », a déclaré le souverain pontife, invitant à prier pour que « les églises et les écoles demeurent toujours des lieux de sécurité et d’espérance ».
Cette série d’attaques s’inscrit dans un contexte de recrudescence des kidnappings dans le nord-ouest du pays. Tout a commencé le lundi 18 novembre, lorsque 25 jeunes filles ont été enlevées dans un lycée de l’État de Kebbi, avant que, le jeudi 19 novembre, l’église apostolique du Christ à Kwara ne soit attaquée, entraînant la mort de deux fidèles et l’enlèvement de 38 personnes, avec une rançon exigée de 100 millions de nairas (≈69 000 dollars) par victime. Puis, vendredi 22 novembre, un raid mené par des hommes armés arrivant à moto et tirant sporadiquement a frappé l’école Sainte-Marie, dans l’État de Niger, emportant 315 élèves et enseignants. Ces États – Kebbi, Kwara et Niger – forment un corridor de vulnérabilité où les forêts servent de refuges naturels aux criminels.
Pour comprendre ces enlèvements, il faut rappeler l’insurrection jihadiste lancée par Boko Haram dans le nord-est en 2010. Quinze ans plus tard, ce conflit a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé plus de deux millions de personnes. Boko Haram s’est scindé en deux : le groupe originel, affaibli, et l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), plus structuré.
Cependant, les attaques récentes dans le nord-ouest ne portent pas la marque des jihadistes : pas de revendications politiques, pas de vidéos de propagande, seulement des demandes de rançon. Dans cette région, ce sont surtout des bandes de « yan bandidi », motivées par l’argent, qui exploitent les zones non gouvernées depuis les années 2010. Selon l’ACLED, 1 923 attaques contre des civils ont été recensées au Nigeria cette année, causant plus de 3 000 morts. Les écoles et les lieux de culte sont devenus des cibles faciles pour ces réseaux criminels, révélant l’ampleur des failles structurelles et sécuritaires du pays.
Une crise qui dépasse le religieux
Bien que certains dénoncent une persécution des chrétiens, les autorités nigérianes rappellent que les violences frappent aveuglément chrétiens et musulmans, chacun représentant environ la moitié de la population. Ces enlèvements sont avant tout le résultat d’un cocktail explosif : banditisme économique, tensions ethno-religieuses et État débordé.
Le président américain Donald Trump a menacé d’une intervention militaire, invoquant la protection des chrétiens. De son côté, le gouvernement du président Bola Tinubu a opté pour une double stratégie : fermeture temporaire de 41 écoles fédérales dans le nord, privant des millions d’enfants d’éducation, et intensification des patrouilles militaires. Certaines ONG locales ont néanmoins réussi à libérer des otages sans rançon, apportant un souffle d’espoir au milieu de la crise.
Ces enlèvements ne relèvent pas d’une conspiration anti-chrétienne, mais d’un cocktail explosif : banditisme économique, tensions ethnoreligieuses et État débordé. Les attaques frappent aveuglément écoles musulmanes et églises chrétiennes, révélant les failles d’un pays riche en ressources mais pauvre en gouvernance.

























