En République démocratique du Congo, une question reste sans réponse depuis plusieurs jours : où se trouve Augustin Matata Ponyo ? L’ancien Premier ministre et figure de l’opposition congolaise est porté disparu depuis sa condamnation à dix ans de travaux forcés pour détournement de fonds publics. Son parti politique, le Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD), tire la sonnette d’alarme et réclame des comptes aux autorités.
L’inquiétude est palpable dans les rangs de l’opposition. « Il n’est ni à son domicile, ni joignable par téléphone, ni visible dans aucun centre de détention officiel », affirme Franklin Tshiamala, secrétaire général du LGD. Selon lui, la situation est grave : « Nous craignons le pire. Si l’État a des informations, il doit les partager. Il s’agit d’un homme public, ancien chef de gouvernement, député national. Son sort ne peut être une affaire de rumeur ou de spéculation ».
Condamné par la Cour constitutionnelle le 20 mai dernier pour son rôle présumé dans le détournement de fonds liés au projet agro-industriel de Bukanga-Lonzo, Matata Ponyo avait dénoncé un procès politique. Dès le lendemain du verdict, il semblait avoir disparu de la circulation. Depuis, aucune trace officielle.
Des spéculations contradictoires circulent. Tandis que certains proches affirment qu’il aurait pu quitter clandestinement Kinshasa, des membres du gouvernement tournent les inquiétudes en dérision. Un responsable contacté par RFI le 31 mai a qualifié les alertes de son parti de « plaisanterie politique », allant jusqu’à qualifier les responsables du LGD d’« histrions ». Des accusations rejetées fermement par Franklin Tshiamala : « On parle de l’intégrité physique d’un homme, pas d’un jeu politique. Certains disent qu’il serait en France, d’autres en Belgique ou aux États-Unis. D’autres encore prétendent qu’il est bien au Congo, prêt à être arrêté. Mais en réalité, personne ne sait. Et c’est précisément cela qui est grave ».
Dans un rebondissement inquiétant, le parti affirme également que la fille de Matata Ponyo a été empêchée de quitter le territoire congolais. Son passeport aurait été confisqué par les services migratoires alors qu’elle s’apprêtait à embarquer pour les États-Unis.
Cette affaire survient dans un contexte politique sous tension. Depuis plusieurs mois, les procès d’anciens dignitaires se multiplient, dans ce que certains observateurs dénoncent comme une instrumentalisation de la justice à des fins d’épuration politique. Matata Ponyo, ancien ministre des Finances puis Premier ministre de 2012 à 2016 sous la présidence de Joseph Kabila, s’était érigé ces dernières années en opposant frontal du régime actuel.
Sa disparition soulève aujourd’hui des interrogations graves sur l’état de droit et la transparence des institutions en RDC. En l’absence d’un communiqué officiel du gouvernement, la rumeur continue de supplanter l’information, alimentant un climat de confusion, voire de crainte.