Dans la nuit du 8 au 9 juin 2025, le navire humanitaire Madleen, affrété par la Freedom Flotilla Coalition, a été intercepté en eaux internationales par les forces israéliennes à environ 31 milles nautiques des côtes de Gaza. À son bord se trouvaient 12 militants internationaux, dont six ressortissants français, parmi lesquels l’eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan. Parti de Catane (Sicile) le 1er juin, le voilier transportait plusieurs tonnes d’aide humanitaire – vivres pour enfants, produits d’hygiène, matériel médical – destinées à soulager une population gazaouie plongée dans une grave crise humanitaire exacerbée par un blocus israélien maintenu depuis 2007.
Le Madleen, nommé en hommage à Madleen Culab, la première pêcheuse palestinienne, avait pour objectif de briser ce blocus maritime imposé par Israël, renforcé après le conflit de 2023. L’équipage comptait, outre Rima Hassan, des activistes connus, dont la militante écologiste suédoise Greta Thunberg, ainsi que des ressortissants allemands, brésiliens, espagnols, néerlandais et turcs. Malgré les avertissements du ministre israélien de la Défense Israel Katz, qui avait ordonné de « prendre toutes les mesures nécessaires » pour stopper le navire, l’équipage a maintenu sa mission, dénonçant un blocus illégal et appelant à l’ouverture d’un corridor humanitaire.
Selon la Freedom Flotilla Coalition, l’interception s’est déroulée dans un climat tendu : des drones israéliens auraient survolé le navire en larguant une substance irritante, tandis que des vedettes rapides encerclaient le Madleen avant son arraisonnement vers 2 heures du matin. Rima Hassan avait publié un message sur X, décrivant l’équipage comme « non armé » et appelant à la mobilisation citoyenne pour protéger la mission. Des images montrent les passagers, mains levées et portant des gilets de sauvetage, face aux forces israéliennes.
L’Élysée a rapidement réagi : le président Emmanuel Macron a exigé le « retour dans les plus brefs délais » des six ressortissants français — Rima Hassan, Baptiste André, Omar Faiad, Pascal Maurieras, Yanis Mhamdi et Reva Viard. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a rappelé que la France avait averti les passagers des risques dès le départ du projet et maintenu un dialogue avec Israël afin d’éviter tout incident. Les services consulaires ont demandé un accès immédiat aux Français détenus pour vérifier leur sécurité et organiser leur rapatriement depuis le port israélien d’Ashdod, où le Madleen a été dérouté.
Sur le plan international, la Turquie, dont un ressortissant faisait partie de l’équipage, a dénoncé une « violation flagrante du droit international », qualifiant l’interception d’« attaque odieuse » en eaux internationales. L’Espagne, avec un militant espagnol à bord, a convoqué un diplomate israélien en signe de protestation. La ministre espagnole Yolanda Díaz a appelé à une « réponse ferme » de l’Union européenne. Des organisations comme Amnesty International et Adalah ont dénoncé une violation des obligations internationales, notamment les injonctions de la Cour internationale de Justice pour un accès humanitaire libre à Gaza.
Cette interception intervient alors que Gaza traverse une crise humanitaire dramatique. Selon l’ONU, 2,1 millions de personnes font face à une famine imminente après plus de 11 semaines sans aide. Depuis le 2 mars 2025, Israël impose un blocus total, aggravant les pénuries de nourriture, d’eau et de médicaments. La Gaza Humanitarian Foundation, critiquée pour son opacité, n’a pas réussi à répondre aux besoins croissants. Le Madleen transportait un chargement symbolique, notamment riz, lait infantile et prothèses pour enfants, destiné à attirer l’attention sur cette catastrophe.
En France, l’affaire a suscité une vive émotion à gauche. Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une « arrestation illégale » et appelé la marine française à intervenir. L’eurodéputée Manon Aubry a critiqué le « silence complice » d’Emmanuel Macron, rappelant que Rima Hassan bénéficie de l’immunité parlementaire. Olivier Faure (PS) et Marine Tondelier (Écologistes) ont également exprimé leur soutien, dénonçant un blocus « inhumain ». Sur les réseaux sociaux, le hashtag #AllEyesOnMadleen a largement circulé, amplifiant la mobilisation.
Israël a indiqué que les passagers seraient expulsés vers leurs pays d’origine et que l’aide serait acheminée par des « canaux humanitaires officiels ». La Freedom Flotilla Coalition a qualifié l’action de « piraterie internationale » et affirmé que l’interception en eaux internationales est illégale, une position partagée par la rapporteure spéciale de l’ONU pour la Palestine.
Pour la France, cette affaire représente un défi diplomatique délicat. Alors que Paris émet des « doutes » sur le respect par Israël du droit international humanitaire, l’incident pourrait accentuer les tensions avec Tel-Aviv, déjà critiqué pour son offensive à Gaza, qui aurait fait plus de 50 000 morts selon les autorités locales. La gestion de cette crise par le gouvernement français sera scrutée, tandis que certaines voix réclament des sanctions contre Israël et la reconnaissance de l’État palestinien.
L’interception du Madleen met en lumière les défis complexes autour du blocus de Gaza et des initiatives humanitaires en pleine guerre. Pour Rima Hassan et ses compagnons, bien que la mission ait été stoppée, elle a permis d’attirer l’attention internationale sur la tragédie gazaouie. Comme l’avait écrit Hassan avant l’arraisonnement : « Notre sécurité dépend de votre mobilisation. » Alors que les passagers attendent leur retour, la communauté internationale est appelée à répondre à cet appel pour la justice et l’humanité.