La terreur a de nouveau frappé le nord-est du Nigeria. Dans la nuit de mercredi à jeudi, la ville de Kirawa, située dans l’État de Borno, a été la cible d’une violente attaque du groupe jihadiste Boko Haram. Les assaillants, armés et déterminés, ont incendié des habitations, une caserne militaire ainsi que le palais du chef traditionnel, provoquant un exode massif de près de 5 000 habitants.
Selon des témoins et responsables locaux, environ 3 000 personnes ont traversé en urgence la frontière pour se réfugier dans les villages camerounais voisins, tandis que 2 000 autres ont fui vers Pulka, Gwoza et Maiduguri, capitale régionale située à 130 km. « Kirawa est aujourd’hui complètement désertée », a confié Hassan Butari, un rescapé arrivé à Maiduguri.
Même le chef traditionnel, Abdulrahman Abubakar, a dû s’enfuir, son palais ayant été réduit en cendres. Dans une vidéo diffusée en ligne, Boko Haram a revendiqué l’assaut, montrant ses combattants incendiant la caserne militaire et scandant des slogans de victoire.
Cette attaque survient dans un contexte d’intensification de l’insurrection jihadiste. Boko Haram et sa faction rivale, l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), multiplient les offensives dans la région, ciblant bases militaires et villages frontaliers. Selon l’ONG Good Governance Africa, l’ISWAP a déjà pris le contrôle d’au moins 17 bases militaires nigérianes en 2025, grâce à l’utilisation de drones et de combattants étrangers.
La prise de Kirawa n’est pas un incident isolé. Quelques semaines plus tôt, la ville frontalière de Banki avait subi un sort similaire, accentuant le sentiment d’abandon des populations locales face à des insurgés toujours plus audacieux.
Le retrait partiel de la force d’intervention multinationale, après une attaque subie en août dernier, a laissé Kirawa et ses environs particulièrement vulnérables. « Nous demandons des renforts immédiats pour reprendre la ville et protéger nos populations », a lancé Yakubu Ali, chef communautaire et responsable local du développement. Pour l’instant, seules des milices d’autodéfense et quelques soldats isolés tentent d’assurer une défense dérisoire.
Depuis 2009, l’insurrection de Boko Haram a fait plus de 40 000 morts et déplacé plus de deux millions de personnes au Nigeria, selon l’ONU. La crise humanitaire a débordé vers les pays voisins — Niger, Tchad et Cameroun — alimentant une instabilité chronique dans toute la région du lac Tchad.
L’attaque de Kirawa vient rappeler que, seize ans après le début de l’insurrection, le nord-est du Nigeria reste un champ de bataille, où l’État peine à rétablir son autorité et où les civils continuent de payer le prix le plus lourd.