Komo, 1er décembre 2025 – Le sud du Kordofan a été le théâtre d’une des frappes les plus meurtrières contre des civils depuis le début de la guerre au Soudan : au moins quarante personnes, pour la plupart des étudiants préparant des carrières médicales, ont trouvé la mort dans le bombardement d’une école d’infirmières à Komo. Selon plusieurs témoins, des flammes ont englouti l’établissement et des habitants ont dû creuser plus de quarante tombes dans la journée pour enterrer les victimes.
« J’ai vu les flammes s’élever de l’école d’infirmières. Les gens essayaient d’éteindre le feu avec des seaux d’eau, mais il était trop tard », raconte Kafi Kalo, habitant de Heiban, à une trentaine de kilomètres de là. Il s’est rendu immédiatement à Komo, où il a de la famille. « Quarante cercueils sont sortis du village ce jour-là », affirme-t-il dans un message vocal envoyé via le réseau satellite Starlink, seul moyen de communication encore fonctionnel dans cette zone montagneuse et isolée.
Un deuxième habitant de Heiban, Tih Issa, raconte la même scène macabre : « Nous sommes venus avec des pelles pour aider à enterrer les morts. Il y avait tellement de corps… Nous avons creusé plus de 40 tombes en une seule journée. »
Les Forces de soutien rapide (FSR), qui contrôlent désormais l’ensemble du Darfour voisin, et l’organisation de défense des droits humains Emergency Lawyers accusent sans ambiguïté l’armée régulière soudanaise (SAF) d’avoir délibérément visé l’établissement de formation médicale. Dans un communiqué publié dimanche sur leur chaîne Telegram, les FSR parlent même de « 45 morts, majoritairement des jeunes filles et garçons qui se préparaient à sauver des vies ».
Une source au sein de l’état-major de l’armée a catégoriquement nié ces accusations : « Les forces armées soudanaises ne bombardent ni ne ciblent jamais les civils ou les infrastructures civiles. Nos opérations visent exclusivement les groupes terroristes. »
Ce drame intervient alors que le Kordofan-Sud est devenu, depuis la chute totale du Darfour fin octobre 2025, le nouveau cœur battant du conflit. Région pétrolifère, agricole et stratégique, elle constitue la principale voie d’accès terrestre pour les FSR qui ambitionnent de remonter vers Khartoum, toujours solidement tenue par l’armée du général al-Burhan.
Les combats continuent de ravager le sud du Kordofan, autour des villes de Kadugli, Dilling et désormais Komo, avec une implication active du mouvement rebelle SPLA-N d’Abdelaziz al-Hilu, allié tactique des paramilitaires de Hemedti dans cette région stratégique.
Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), près de 5 000 habitants ont fui plusieurs villages du sud du Kordofan au cours du seul dernier mois, rejoignant les quelque 12 millions de Soudanais déjà déplacés à l’intérieur ou à l’extérieur du pays.
Deux ans et demi après le déclenchement du conflit entre l’armée et les Forces de soutien rapide (FSR) en avril 2023, le Soudan s’enfonce toujours davantage dans le chaos. L’ONU qualifie cette situation de « pire crise humanitaire au monde » : des dizaines de milliers de morts – un bilan exact impossible à établir –, des villes entières détruites, des accusations répétées de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité de part et d’autre, et une population civile prise au piège entre bombardements, pillages et famine.

























