Ces derniers temps, une sombre réalité a envahi la République algérienne, répandant ses griffes funestes sur toutes les strates de la société. Hommes et femmes, jeunes et vieux, tous sont touchés par cette vague dévastatrice. Les visages usés par le temps se donnent la mort, tout comme les innocentes âmes juvéniles. Les hommes succombent, les femmes succombent, les adolescentes disparaissent dans les abysses de la mort ou fuient les foyers parentaux, laissant derrière elles des familles brisées.
Un océan de tristesse, de désespoir, d’anxiété, d’addictions malsaines à la drogue et à la débauche s’étend sans relâche d’est en ouest, du nord au sud. Dans notre pays, étouffés par la faim, la pauvreté, la prostitution et la main de fer militaire, nos concitoyens errent dans un état de délabrement psychique permanent, privés de toute sécurité et de toute paix. La crainte de l’injustice des généraux, la terreur d’une guerre civile ravageuse et du déracinement des familles, l’angoisse de l’épuisement des ressources naturelles et de l’existence dans une ère d’obscurité, de famine et de soif, engloutissent les âmes dans un tourbillon d’incertitudes, d’anxiété, de panique et de désespoir. Ainsi, pour la majorité, la mort et le suicide apparaissent comme l’unique échappatoire à l’enfer orchestré par les généraux…
Récemment, un jeune homme dans la fleur de l’âge a décidé de franchir les portes de l’au-delà en s’embrasant dans les couloirs de l’ Hopital Youcef Damardji, à Tiaret, sous les yeux horrifiés des témoins. Il a imprégné son corps d’une quantité d’essence avant d’y mettre le feu, scellant ainsi son destin funeste. Son frère s’est précipité, accompagné de citoyens impuissants, pour tenter d’étouffer les flammes dévorantes, mais il n’a pu empêcher les brûlures cruelles de marquer son corps meurtri. Les circonstances de cette tragédie ont débuté lorsque ce jeune homme a contemplé son autre frère, oscillant entre la vie et la mort aux urgences de l’hôpital. Consumé par la détresse, il s’est laissé submerger par l’impulsion irrépressible d’un acte désespéré. Son frère avait lui-même tenté de mettre fin à ses jours en se jetant du deuxième étage d’un immeuble, après avoir été expulsé de son domicile et licencié par les autorités, sous prétexte qu’il appartenait à un parti d’opposition et qu’il alimentait les flammes d’une résistance rallumée, diffusant mensonges et faux-semblants sur les comptes bancaires des généraux et de leurs affidés, tant en Algérie qu’à l’étranger.
Selon une source associative, ces deux cas, aussi tragiques soient-ils, ne constituent qu’une infime partie d’un nombre colossal de suicides qui ensanglantent notre nation. Chaque victime du suicide narre des récits de misère, de malheur, d’injustice et d’agonie. Parmi elles, certains ont été cruellement violés dans les sombres cellules de nos commissariats, uniquement sur la base de soupçons ou parce qu’ils ont osé clamer, un jour, l’injustice et la détresse qui affligent notre pays. D’autres ont erré toute leur vie dans les quartiers et les ruelles, sans-abri, abandonnés de tous, dans un pays flottant sur les richesses du gaz et du pétrole. D’autres encore, après avoir été violées par leur employeur, ont été enceintes de lui, mais l’État, corrompu jusqu’à la moelle, refuse de leur rendre justice, car cet employeur maudit est le proche parent d’un haut dignitaire de la sécurité nationale.
Si je vous contais les histoires déchirantes et les motivations qui poussent ces âmes au suicide, la compassion et la pitié s’empareraient de vous. Que Dieu protège notre cher pays, ô mon Algérie déchirée !