Le 2 octobre 2025, à Sotchi, lors du forum Valdaï, Vladimir Poutine a livré un discours offensif qui a résonné bien au-delà de l’Europe. Alors que les tensions restent vives autour de la guerre en Ukraine et des sanctions occidentales, le président russe a mêlé menaces militaires, critiques économiques et plaidoyer géopolitique pour un « monde multipolaire ».
Face à l’Europe, il a promis une réponse « forte et décisive » à toute provocation, dénonçant la « militarisation croissante » du continent et accusant les alliés de Kiev de nourrir une « escalade permanente » du conflit. Il a réaffirmé que la Russie n’avait « jamais initié » de guerre, mais que sa sécurité et sa souveraineté ne seraient jamais compromises. Ces déclarations interviennent dans un contexte explosif, quelques jours seulement après l’interception spectaculaire par la France du pétrolier Boracay – un navire de la « flotte fantôme » russe, chargé de 750 000 barils de brut, saisi en Atlantique Nord et escorté vers Saint-Nazaire.
Cette saisie, une première pour l’OTAN, a provoqué un tollé mondial : Moscou a placé sa flotte baltique en alerte, l’Inde – acheteur du pétrole saisi – a convoqué l’ambassadeur de France, et le commerce maritime international redoute désormais une spirale d’interceptions réciproques. Paris, qui justifie l’opération par les sanctions européennes et une volonté d’empêcher une « guerre hybride » russe, apparaît isolé dans sa démarche, tandis que Poutine dénonce une stratégie « égoïste » de l’Occident.
Mais le maître du Kremlin a également déplacé le débat sur le terrain économique mondial, en attaquant directement Washington. Il a qualifié d’« échec » la décision de Donald Trump d’imposer des droits de douane supplémentaires de 25 % sur le pétrole russe acheté par l’Inde, portant ainsi à 50 % la taxation totale. Poutine a salué New Delhi comme « un pays qui se respecte » : « Le peuple indien ne tolérera jamais le manque de considération, et je connais le Premier ministre Modi : il ne cédera pas. »
Ce message illustre une stratégie claire : opposer au bloc occidental un axe de résistances constitué par des puissances émergentes comme l’Inde et la Chine, qui continuent de commercer massivement avec Moscou malgré les sanctions. Pour Poutine, ces partenaires sont les piliers d’un nouvel ordre mondial post-occidental, capable de contourner à la fois les pressions militaires en Europe et les barrières économiques américaines.
Entre menaces contre l’Europe, ripostes aux droits de douane américains et soutien affiché à l’Inde, le discours de Sotchi révèle la double ambition du Kremlin : maintenir la pression militaire sur l’OTAN tout en se présentant comme le protecteur des équilibres énergétiques mondiaux. Mais cette stratégie, qui s’appuie à la fois sur la « flotte fantôme » et sur des alliances asiatiques, risque d’accentuer la fracture entre l’Occident et le reste du monde, plongeant la scène internationale dans une escalade aux dimensions multiples.