Amman, 1er décembre 2025 – Les autorités jordaniennes ont porté un coup majeur au narcotrafic en démantelant, dimanche, un vaste réseau et en mettant la main sur 1,2 million de comprimés de Captagon, une amphétamine largement consommée au Moyen-Orient. Selon le Département jordanien de lutte contre les stupéfiants (AND), qui qualifie l’opération de « succès retentissant », il s’agit de l’une des plus importantes saisies de l’année dans le royaume.
La drogue, dont la valeur se chiffre en plusieurs millions de dollars sur le marché noir, était dissimulée dans un rouleau compresseur de chantier spécialement modifié pour accueillir un compartiment secret aménagé au cœur de la machine. Cette méthode de camouflage, d’un niveau de sophistication particulièrement élevé, témoigne de l’ingéniosité croissante de réseaux de plus en plus structurés.
Cette opération d’envergure est l’aboutissement de plus de deux mois d’enquête, déclenchée après un renseignement signalant un envoi massif de Captagon en provenance de Syrie et destiné à transiter par la Jordanie avant d’être acheminé vers les marchés lucratifs du Golfe, notamment l’Arabie saoudite. Après plusieurs semaines de surveillance, les forces antidrogue ont lancé, dimanche 30 novembre en fin d’après-midi, une série de raids coordonnés visant un entrepôt central et cinq autres sites liés à la filière.
En l’espace de quelques heures, les unités de l’AND, appuyées par des équipes spécialisées, ont neutralisé l’ensemble du réseau sans qu’un seul coup de feu ne soit tiré. Les dix suspects – tous de nationalité jordanienne selon les premières informations – ont été arrêtés en flagrant délit. C’est lors du démontage partiel du rouleau compresseur stationné dans l’entrepôt que les enquêteurs ont découvert les 1,2 million de comprimés soigneusement emballés sous vide et fixés dans le châssis métallique.
« La cache était pratiquement indétectable. Il a fallu démonter la machine pour découvrir le compartiment », confie un policier antidrogue ayant participé à l’opération.
Drogue la plus consommée au Moyen-Orient, le Captagon – parfois surnommé « la drogue du djihad » en raison de son usage dans les conflits en Syrie et en Irak – est principalement produit dans des laboratoires clandestins en Syrie et au Liban. Située sur la principale route de transit vers l’Arabie saoudite, la Jordanie subit depuis plusieurs années une pression constante de réseaux de plus en plus agressifs.
Les autorités multiplient ainsi les interceptions : 600 000 comprimés avaient été saisis en août à la frontière nord, puis 800 000 en octobre lors du démantèlement d’un autre réseau. La saisie réalisée ce week-end dépasse largement ces précédents records et illustre l’ampleur du défi sécuritaire auquel le royaume est confronté.
Le ministre de l’Intérieur, Mazen Al-Faraya, a salué « le professionnalisme et la détermination » des forces engagées, rappelant que la lutte contre le Captagon constitue « une priorité nationale absolue », tant cette drogue menace « la jeunesse, la cohésion sociale et la stabilité du royaume ».
Les dix suspects ont été déférés devant la Cour de sûreté de l’État, juridiction chargée des affaires de trafic de stupéfiants à grande échelle. Ils encourent des peines pouvant aller jusqu’à la réclusion à perpétuité.
Cette saisie record confirme, une fois de plus, que la frontière nord du pays demeure l’un des foyers les plus sensibles de la région, où les trafiquants exploitent la moindre faille pour inonder les marchés du Golfe. Pour Amman, la lutte contre le Captagon reste plus que jamais un enjeu stratégique et sécuritaire de premier ordre.


























