Le stade de Douéra, flambant neuf et inauguré il y a à peine quelques mois dans la banlieue ouest d’Alger, fait déjà parler de lui… mais pas pour les bonnes raisons. Sa pelouse de dernière génération, un gazon hybride renforcé de fibres synthétiques, certifié FIFA Quality Pro et posé à plus de 2 millions d’euros, censée accueillir les matchs de haut niveau du MC Alger, les finales de la Coupe d’Algérie et, à terme, des rencontres internationales, se dégrade à vue d’œil.
Des plaques jaunes, des zones brûlées, un gazon clairsemé, parfois carrément pelé jusqu’à la terre : l’image est désolante pour une infrastructure qui a coûté plus de 140 millions d’euros et qui était présentée comme « le bijou du football algérien ». Quatre mois seulement après la pose, le terrain ressemble à un vieux tapis usé jusqu’à la corde. Les joueurs du MC Alger, qui devaient s’y installer en janvier, parlent déjà d’un « terrain de cross ». Les photos circulant sur les réseaux sociaux donnent l’impression d’un champ après bombardement.
L’arme du crime ? L’eau potable de la SEAAL, branchée directement sur les 128 arroseurs automatiques du stade. Aucun filtre, aucune cuve de décantation, aucune déchloration. Juste le réseau municipal, avec son chlore et ses chloramines à pleine dose.
Résultat : le chlore a rongé les racines comme un acide lent, les chloramines, plus stables, ont achevé le travail. Le gazon n’a pas jauni, il a été méthodiquement exécuté. Les analyses de sol menées la semaine dernière sont formelles : pH déséquilibré, toxicité chlorée, microfaune détruite. Diagnostic : mort cérébrale du tapis vert.
« On avait pourtant prévenu tout le monde, du directeur de l’ONA jusqu’au jardinier en chef », lâche, amer, l’ingénieur agronome qui a supervisé la pose. « Une cuve de 500 m³ avec 72 h de repos ou un simple filtre à charbon actif à 18 000 euros aurait suffi. On nous a répondu : “C’est trop cher.” Aujourd’hui, ils vont claquer entre 900 000 et 1,3 million d’euros pour tout arracher et tout reposer. Bravo l’économie. »
Car oui, il faudra tout arracher et reposer. Coût estimé : entre 900 000 et 1,3 million d’euros. Sans compter les matchs reportés, les entraînements annulés et l’image d’un pays capable d’inaugurer des stades de Coupe du monde… mais incapable d’arroser une pelouse.
Douéra n’est malheureusement pas un cas isolé. Baraki en 2023, Tizi Ouzou en 2024, Oran en 2022… partout le même scénario. À chaque fois, on jure qu’« on va tirer les leçons ». À chaque fois, on recommence.
Si l’on continue à investir des millions dans des stades ultramodernes pour ensuite confier leur pelouse au premier jardinier venu et arroser comme si l’on lavait sa voiture… alors là, oui, on est champions du monde toutes catégories.



























