Les prix du pétrole ont bondi d’environ 5 %, atteignant leur plus haut niveau en deux semaines, après l’annonce par Washington de nouvelles sanctions ciblées contre les géants russes Rosneft et Lukoil. Ce durcissement, qui vise le cœur du secteur énergétique russe, a aussitôt provoqué un effet domino sur les marchés mondiaux, poussant le Brent à 65,96 dollars le baril et le WTI à 61,83 dollars.
Les sanctions américaines — rapidement suivies par le Royaume-Uni et l’Union européenne — symbolisent une escalade décisive dans la guerre économique entre Washington et Moscou. Les deux compagnies visées, représentant plus de 55 % de la production pétrolière russe, se trouvent désormais exclues de la plupart des transactions en dollars.
« Ces mesures risquent de restreindre les canaux d’exportation du brut russe et de créer un déficit d’approvisionnement sur le marché mondial », estime Neil Wilson, analyste chez Saxo Markets.
Les entreprises publiques chinoises ont suspendu leurs achats de pétrole auprès de Rosneft et Lukoil, redoutant des sanctions secondaires. En Inde, la situation est plus nuancée , les raffineurs privés — dont Reliance Industries — réévaluent leurs contrats mais n’ont pas encore rompu totalement les liens avec les producteurs russes.
Selon des sources gouvernementales indiennes, les nouvelles sanctions américaines compliquent les transactions, sans toutefois menacer directement l’approvisionnement énergétique du pays. Deux ministères clés, celui des Affaires étrangères et celui du Pétrole et du Gaz naturel, suivent de près la situation.
« L’Inde prend ses décisions en gardant à l’esprit la sécurité énergétique de ses 1,4 milliard de citoyens. C’est sa priorité absolue », a déclaré un haut responsable à New Delhi.
Pour l’heure, l’Inde explore plusieurs sources alternatives — notamment l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Iran — pour maintenir la stabilité de son marché intérieur.
Face à la crainte d’un déséquilibre mondial, le ministre koweïtien du Pétrole a affirmé que l’OPEP était prête à augmenter temporairement sa production pour compenser la baisse des exportations russes. Une promesse accueillie prudemment par les marchés, tant la Russie demeure un acteur central de l’alliance OPEP+.
À Moscou, Vladimir Poutine a réagi avec défi :« Le remplacement du pétrole russe prendra du temps. Ces sanctions sont une tentative de pression politique, mais aucun pays respectable ne cède sous la contrainte. »
Le Kremlin accuse les États-Unis de vouloir redessiner la carte énergétique mondiale au profit de leurs exportations de pétrole et de gaz.
Selon Edward Fishman, ancien responsable du Département d’État américain, Washington pourrait désormais cibler les banques chinoises, les commerçants émiratis et les raffineurs indiens encore liés à Moscou : « Nous entrons dans une phase où les États-Unis pourraient imposer des sanctions secondaires, étendant leur pression bien au-delà de la Russie. »
Cette perspective inquiète les marchés asiatiques, où plusieurs acteurs financiers envisagent déjà de réduire leurs expositions au pétrole russe pour éviter tout risque de représailles.
Les banques d’investissement estiment que, si les sanctions précédentes avaient eu un effet limité, ce nouveau cycle coordonné entre Washington, Londres et Bruxelles pourrait bouleverser durablement l’équilibre de l’offre mondiale.
« Le pétrole redevient une arme géopolitique », résume un économiste européen. « Washington frappe Moscou, mais c’est tout le marché mondial qui qui tremble. »


























