Yaoundé, 23 octobre 2025 — À 78 ans, Issa Tchiroma Bakary, ex-ministre et fidèle de longue date de Paul Biya, s’est mué en fer de lance d’une opposition virulente. Fondateur du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC), il s’autoproclame vainqueur de la présidentielle du 12 octobre avec « plus de 60 % des suffrages », défiant ouvertement le régime en place et accusant un « pouvoir clanique et corrompu » de fraudes massives.
Alors que le Conseil constitutionnel doit proclamer les résultats officiels dans les prochains jours, Tchiroma et son équipe diffusent des procès-verbaux prétendument authentiques pour étayer leurs claims. Des anomalies – comme des taux de participation dépassant 100 % dans certains bureaux – ont été pointées par les autorités, qui qualifient l’annonce d’« illégale ». Le gouvernement a réagi en renforçant la sécurité et en imposant un couvre-feu à Garoua, fief du candidat.
Ingénieur originaire du Nord, Tchiroma a connu les geôles après le coup d’État avorté de 1984. Député, puis ministre des Transports (1992), de la Communication (2009-2019) et de l’Emploi, il incarnait la loyauté au RDPC. Sa rupture en juin 2025, suivie d’une candidature éclair et d’excuses publiques pour avoir « défendu un système corrompu », a surpris. « Je ne partage plus les valeurs de ce régime », a-t-il lancé.
Depuis le scrutin, des manifestations pro-FSNC secouent Douala, Bafoussam et Garoua. À Douala, heurts avec la police ; à Garoua, un véhicule de gendarmerie incendié. Le politologue Dr Sehou Ahmadou note une « percée inattendue » au Nord : « Tchiroma canalise le ras-le-bol contre un RDPC dominant depuis des décennies. »
Tchiroma dénonce bourrages d’urnes et falsifications, rejetant les contestations de la Commission de recensement. « Ce système est incapable de transparence », assène-t-il.
Sans résultats officiels, sa « victoire » reste contestée. « C’est une légitimité symbolique contre un pouvoir enraciné depuis 43 ans », analyse Ahmadou. Observateurs craignent une escalade violente et appellent au dialogue pour éviter une crise majeure.
Ce bras de fer marque-t-il la fin du bipartisme camerounais ou un sursaut éphémère ? Tchiroma, ex-défenseur du régime, en est devenu l’adversaire le plus audible, ouvrant une ère d’incertitude dans un pays en quête de renouveau.


























