Haytham Ali Tabatabai, connu sous le nom de guerre de Sayyid Abou Ali ou Abu Ali Tabatabai, était un commandant militaire de premier plan au sein du Hezbollah, le groupe chiite libanais allié à l’Iran et considéré comme une organisation terroriste par Israël, les États-Unis et plusieurs pays occidentaux. Né en 1968 à Bashoura, un quartier populaire de Beyrouth, il était le fils d’un père d’origine iranienne et d’une mère libanaise.
Au fil des décennies, Tabatabai a gravi les échelons militaires du Hezbollah, qui est passé d’une guérilla à la force armée la plus puissante du Liban, tout en devenant un acteur politique majeur avec des sièges au Parlement et des ministres dans divers gouvernements. Doté d’une vaste expérience opérationnelle, il a participé à de nombreuses actions sur le terrain dans le sud-Liban occupé. De 1996 à 2000, il a dirigé l’axe Nabatieh, une zone de commandement stratégique jusqu’au retrait israélien de 2000. Par la suite, de 2000 à 2008, il a pris la tête de l’axe Khiam, une région frontalière clé, et était aux commandes lors de la guerre de 2006 entre le Hezbollah et Israël – un conflit de 34 jours soldé par un cessez-le-feu et considéré comme un match nul, où ses unités ont joué un rôle crucial dans la résistance.
Son ascension s’est accélérée pendant et après la guerre de 2024 entre Israël et le Hezbollah (octobre 2023-novembre 2024), un conflit dévastateur qui a vu Israël éliminer la plupart des hauts commandants du groupe, dont Fouad Chokor, Ibrahim Akil et Ali Karaki. Tabatabai a alors dirigé la branche des opérations du Hezbollah, avant de remplacer Karaki à la tête du front sud. Nommé chef d’état-major (ou « de facto military chief » selon certaines sources) peu après le cessez-le-feu négocié par les États-Unis en novembre 2024, il était chargé de restructurer l’appareil militaire du groupe : reconstituer les unités décimées, former des remplaçants pour les commandants tués, et restaurer les capacités opérationnelles en violation présumée de l’accord de trêve et de la résolution 1701 de l’ONU. Cette mission en faisait une cible prioritaire pour Israël, qui l’accusait d’orchestrer le réarmement du Hezbollah pour une future guerre. Le Département d’État américain l’avait d’ailleurs désigné comme « Global Terrorist » en 2016, offrant une récompense de 5 millions de dollars pour des informations le concernant, en raison de son rôle dans la Force Radwan et les opérations au Moyen-Orient.
Avant sa mort, Tabatabai était peu connu publiquement au Liban, fidèle à la doctrine du Hezbollah qui impose l’anonymat à ses officiers pour contrer les renseignements israéliens. Sa disparition, confirmée le 23 novembre 2025 lors d’une frappe aérienne israélienne sur un immeuble du quartier de Haret Hreik (Dahieh) dans la banlieue sud de Beyrouth, a révélé l’étendue de son influence. Cette attaque, la première sans avertissement dans cette zone depuis le cessez-le-feu et au milieu d’une recrudescence des violations israéliennes dénoncées par l’ONU, a tué cinq personnes (dont Tabatabai et quatre autres militants : Qassem Hussein Berjawi, Rifaat Ahmad Hussein, Mostafa Asaad Berro et Ibrahim Ali Hussein) et blessé 28 autres, selon le ministère libanais de la Santé. Il s’agissait de la troisième tentative d’assassinat contre lui, les deux précédentes datant de la guerre de 2024 et d’une opération en Syrie.
Le Hezbollah a qualifié Tabatabai de « grand commandant djihadiste martyr » dans un communiqué, dénonçant une « attaque perfide » et une violation du cessez-le-feu.
L’État libanais, via le président Joseph Aoun – qui avait annoncé des négociations de paix avec Israël deux jours plus tôt –, a appelé la communauté internationale à intervenir pour stopper ces « agressions répétées ». La frustration est vive au sud-Liban, où les habitants se sentent abandonnés face aux destructions et à l’impuissance du gouvernement. Des analystes comme Sohaib Jawhar de l’Institut Badil soulignent que cette frappe révèle les faiblesses sécuritaires du Liban.
La mort de Tabatabai, successeur de figures emblématiques, fragilise davantage le Hezbollah, déjà décimé en 2024, mais pourrait galvaniser ses rangs et ses alliés (Iran, Houthis). Qmati a averti d’une « escalade dans tout le Liban », tandis que des experts craignent une spirale régionale impliquant Gaza ou la Syrie. Pour le Liban, épuisé par la crise économique et les guerres, cela renforce l’instabilité, rendant cruciaux les efforts diplomatiques internationaux pour un désarmement du Hezbollah – un sujet brûlant sous pression américaine.



























