Avec les premiers jours du mois sacré de Ramadan, les signes d’un retour de la décennie noire en Algérie commencent à apparaître. Les généraux s’emploient aujourd’hui à raconter et à interpréter les événements politiques d’une manière qui sert leurs intérêts et discrédite leurs adversaires. Par exemple, les médias du régime militaire au pouvoir répètent sans cesse que ce sont les courants d’opposition qui ont toujours plongé le pays dans des spirales de violence. Ces généraux ont réussi, dans une large mesure, à imposer un récit stéréotypé, occultant les faits réels et ignorant leurs propres exactions, si bien que la plupart des Algériens ignorent que les événements des années 1990 ont éclaté après l’assassinat d’étudiants universitaires par les services de sécurité de l’État algérien.
Aujourd’hui, un quartier de la commune du Kadiria, dans la wilaya de Bouira, a été secoué en plein jour par un massacre atroce, perpétré par des hommes masqués appartenant aux services secrets militaires contre une famille entière. Il s’agit d’un professeur retraité, connu pour ses publications critiques contre le régime en place, notamment en tant que l’un des premiers à avoir lancé la campagne « Manich Radhi » dénonçant la pauvreté et la faim en Algérie. Lui, son épouse et trois de ses enfants – quatre filles et un garçon – ont été assassinés sur place, tandis que les deux autres ont été transportés en urgence à l’hôpital de Bouira dans un état critique.
Selon des sources concordantes, des individus inconnus s’étaient introduits dans les habitations, officiellement pour un vol, mais en réalité pour menacer la famille en raison de la dernière publication du professeur, où il critiquait les autorités sur le manque d’eau. En réaction, les habitants de la commune de Kadiria sont descendus dans la rue, bloquant l’autoroute reliant l’Est à l’Ouest du pays. Le débat a enflammé les réseaux sociaux, mais la violence ne s’est pas arrêtée là : un médecin a été sauvagement attaqué à l’arme blanche et tué sur place.
Les criminels des services secrets militaires ne se sont pas contentés de cela. Ils ont agi comme des fauves déchaînés, assassinant l’épouse du médecin et ses trois filles, dont l’une était candidats au baccalauréat. Avant de quitter les lieux, ils ont incendié la maison, dans un acte d’une barbarie extrême, rappelant les atrocités commises par le général Saïd Chengriha durant la décennie noire.

Algerian shown in a file photo dated 12 June 1995 paying their last respects to Hocine "Yamaha" Dehimi, Algeria's most famous soccer fan, in Algiers. Yamaha was killed the day before by suspected Islamic fundamentalists / AFP PHOTO / AFP FILES / STR