Malte se voit abandonnée par l’Europe. De plus en plus de rapports indiquent que le pays utilise des moyens illégaux dans la politique des réfugiés. Mais le gouvernement est silencieux.
Mercredi, il y a eu une manifestation à La Valette devant le siège du Premier ministre. Elle n’était pas dirigée contre la « fermeture » de l’économie et les restrictions à la liberté de circulation. Au lieu de cela, les manifestants, la plupart jeunes, ont exigé que le gouvernement débarque immédiatement les 162 migrants qui étaient sur deux bateaux d’excursion affrétés par le gouvernement au large des côtes de Malte depuis plus de trois semaines.
Certains migrants auraient entamé une grève de la faim, d’autres auraient exprimé des intentions suicidaires. 29 organisations humanitaires ont appelé à manifester. Dans une déclaration commune, ils ont exhorté le Premier ministre Robert Abela du Parti socialiste travailliste à « respecter les droits de l’homme et la dignité des hommes détenus sur les navires ». Leur état physique et mental se détériore rapidement.
Le gouvernement de La Valette affirme que les migrants sont contraints de rester sur des navires en dehors de la souveraineté maltaise en raison de l’épidémie de Corona et du manque de solidarité européenne. Dans un bref communiqué de presse, le Premier ministre a annoncé mercredi que 1222 migrants illégaux supplémentaires étaient arrivés à Malte depuis le début de l’année. L’année précédente, il y en avait 3405. Sur ce nombre, 88 seulement ont jusqu’à présent été acceptées par d’autres partenaires de l’UE, bien qu’il y ait eu des engagements d’accepter 610 migrants.
Pour les réfugiés de bateau cette année, en particulier ceux actuellement hébergés sur les bateaux d’excursion, seuls la France et le Portugal avaient accepté de prendre respectivement 30 et six migrants. La Commission européenne avait promis de s’occuper de la distribution de nouveaux migrants en provenance de Malte, mais cela dépendait de la bonne volonté et des engagements volontaires de chaque pays de l’UE.
Depuis 2005, le gouvernement maltais continue de calculer que seuls 8% des 21 000 migrants illégaux arrivés à Malte via la Méditerranée centrale ont été pris en charge par des partenaires de l’UE. Les États-Unis à eux seuls auraient accueilli deux fois plus de ces migrants que tous les pays de l’UE réunis.
Le gouvernement de La Valette ne semble pas vouloir s’éloigner de sa position ferme sur le différend migratoire. Les médias à La Valette rapportent que Malte opposera son veto à la nomination prévue du contre-amiral italien Ettore Socci en tant que commandant de la nouvelle opération Irini en Méditerranée, à moins que des engagements substantiels de reprendre plus de migrants de Malte ne soient pris vendredi. Le chef des opérations d’Irini est l’Italien Fabio Agostini, son adjoint est le Français Jean-Michel Martinet.
Avec tous les moyens – apparemment également en contradiction avec le droit international – Malte empêche l’arrivée d’autres réfugiés de la mer depuis avril. Selon des informations parues dans des journaux maltais, britanniques et italiens, le matin du 11 avril, les garde-côtes maltais ont empêché un canot pneumatique en provenance de Libye avec 101 migrants, qui se trouvait déjà dans les eaux maltaises de Malte, de continuer vers la côte.
Préoccupés par leur retour en Libye, plusieurs réfugiés de bateau ont sauté à l’eau, mais ont rapidement été ramenés sur le bateau gonflable. Les garde-côtes maltais ont ensuite remis un remplacement pour le moteur hors-bord défectueux du bateau de réfugiés, ainsi que suffisamment de carburant et une boussole, et ont ordonné aux migrants de continuer vers la Sicile. Les migrants ont ensuite atteint Pozzallo sur la côte sud-est de la Sicile le 12 avril. Là, ils ont pu aller à terre et ont été mis en quarantaine pendant deux semaines dans un camp d’accueil.
Le gouvernement de La Valette n’a pas encore officiellement commenté l’incident présumé. Pas non plus à l’accusation selon laquelle le chalutier maltais « Dar Al Salam 1 », le 14 avril, a embarqué une cinquantaine de migrants à bord d’un bateau de réfugiés divulgué dans la zone de recherche et de sauvetage maltaise, les a enfermés sous le pont et les a ramenés en Libye. Auparavant, le bateau flottait en haute mer depuis des jours, à la vue du chalutier et d’autres navires maltais. Selon les survivants, douze personnes ont perdu la mer et se sont noyées pendant cette période.
Des proches de deux victimes ont déposé des accusations contre le Premier ministre maltais, le ministre de l’Intérieur et le chef de l’armée pour avoir omis de fournir une assistance en mer à La Valette mercredi. Selon les médias maltais, le gouvernement de La Valette a chargé les armateurs privés du pays de retrouver les bateaux de réfugiés et de ramener les migrants en Libye.
Le gouvernement ne nie pas la coopération avec les armateurs privés dans la zone de sauvetage en mer de Malte. Cependant, c’est précisément dans le but de sauver la mer, pas de ramener des migrants en Libye. « Rien n’empêche un État d’utiliser les services d’entreprises privées », a affirmé le Premier ministre Abela.