Le gouvernement français est sous pression pour faire la lumière sur la mort de Steve Caniço, dont le corps a été retrouvé dans la Loire lundi, 38 jours après sa disparition lors d’un festival de musique à Nantes. Une enquête de police interne a conclu que les officiers du festival n’étaient pas responsables, mais des questions subsistent.
Caniço a disparu la nuit du 21 juin lors d’un festival techno au bord de l’eau à Nantes, dans l’ouest de la France, à l’occasion de la Fête de la musique, organisée chaque année au niveau national.
La police est intervenue tôt le matin pour disperser les fans, affirmant que la musique avait dépassé le temps imparti. Selon des témoins, la police aurait utilisé des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc pour disperser le parti.
Au cours des affrontements, 14 personnes sont tombées dans la rivière et ont été secourues par les pompiers. Mais ce n’est que lundi, 38 jours plus tard, que le corps de Caniço, âgé de 24 ans, a été retrouvé. Il a été identifié le lendemain.
La police a mené sa propre enquête interne sur ce qui s’est passé. Le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé mardi que l’enquête n’avait révélé aucune preuve d’un lien entre l’intervention des forces de sécurité et la disparition de Caniço.
Il a toutefois reconnu qu’il restait de nombreuses questions sur la manière dont l’événement avait été géré.
« Plus de cinq semaines après les événements, ce qui s’est passé cette nuit-là reste incertain et je ne suis pas satisfait », a-t-il déclaré.
Il a promis la « transparence totale » et l’IGPN va maintenant ouvrir sa propre enquête. Il devrait livrer ses conclusions dans un mois.
La famille et les amis de Steve Caniço réfutent les conclusions de l’enquête de la police et manifestent à Nantes sous le slogan « Justice pour Steve ».
Mardi soir, ils se sont réunis à Nantes pour allumer des bougies le long de la Loire près de l’endroit où il est décédé. Plusieurs d’entre eux étaient en colère.
« Il y a de la colère parce que l’enquête de police interne a déclaré qu’il n’y avait aucun lien entre la mort de Steve et l’intervention de la police », a déclaré Alexane, une amie proche de Caniço.
« Ce qui se passe est incroyable. Pour les amis et la famille de Steve, si personne n’admet ce qui s’est passé, il y aura toujours de l’amertume ».
Nelly, une mère de quatre enfants, était également présente pour exprimer sa colère.
« Ma fille de 24 ans a tout vu. Ces jeunes n’ont rien fait de mal et ils ne dérangent personne », a-t-elle confié à RFI. « Ok, ils ont dépassé d’une demi-heure, grosse affaire. Tu devrais pouvoir en parler. Mais non! Immédiatement, il y a une confrontation ».La police a affirmé ne pas avoir chargé le festival de musique et déclaré que les agents étaient ciblés par des personnes qui lançaient divers objets.
Journaliste Jonathan Bouchet-Petersen a mis en doute les méthodes de la police.
« L’usage massif de gaz lacrymogènes (33 cartouches retirées en 32 minutes), la faible visibilité sur les rives du fleuve à 4h30 du matin, le soir de la Fête de la Musique, avec des fêtards éméchés; c’est la clé pour comprendre ce qui s’est passé », il a tweeté.
Plusieurs commentateurs ont souligné que l’enquête interne de l’IGPN était loin d’être indépendante.
Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, a déclaré mercredi: « L’important, c’est de garantir la transparence et la vérité, ainsi que le souhaite la famille et le public français, légitimes ».
La transparence n’est pas tout à fait la même chose que l’indépendance, mais l’enquête de l’IGPN a effectivement une portée plus large, faisant intervenir la préfecture de police, le conseil municipal et les organisateurs privés participant au festival de musique.
Il vérifiera si le préfet était responsable de ce qui s’est passé, quels ordres ont été donnés à la police pour arrêter la musique et si le conseil local aurait dû autoriser un concert sur les rives sans barrières de protection.
Des questions importantes sans doute, mais la clé reste de savoir si Steve Caniço, dont les amis disent ne pas savoir nager, pourrait être encore en vie si la police n’était pas intervenue.