Kinshasa – La République démocratique du Congo (RDC) a annoncé vendredi le doublement des salaires des soldats et des policiers, selon le ministère des Finances. Cette mesure semble destinée à remonter le moral des forces de sécurité alors que les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda selon Kinshasa et l’ONU, progressent dans l’est du pays.
Le M23 a récemment pris le contrôle des deux principales villes de l’est congolais lors d’une offensive fulgurante, causant des milliers de morts et forçant des centaines de milliers de personnes à fuir leurs foyers. Cette situation accroît la pression sur le président Félix Tshisekedi, confronté à une crise humanitaire et sécuritaire majeure.
Le ministère des Finances a présenté cette augmentation comme « un tournant vers de meilleures conditions » pour l’armée, qui compte environ 260 000 membres selon la loi de finances 2025. Pourtant, sur le terrain, des doutes subsistent. Un officier du Nord-Kivu a confié jeudi : « Nous avons appris que notre solde était doublée, mais nous n’en avons pas encore bénéficié, car nos salaires sont gelés depuis deux mois. » La fermeture des banques après la chute de Goma, l’une des villes perdues, expliquerait ce retard.
Les salaires officiels, fixés entre 100 et 200 dollars par mois depuis 2022 pour tous les grades, restent modestes. L’impact financier de cette mesure sur le budget national demeure flou. Un projet de loi modifiant le budget 2025 devait être soumis au Parlement ce mois-ci, mais il n’a pas encore été rendu public. Valery Madianga, expert congolais en finances publiques, s’inquiète : « Ces dépenses sont engagées hors budget. C’est grave, car personne ne pourra contrôler les effectifs réels ni les salaires effectivement versés. »
Le Rwanda, accusé par la RDC et l’ONU de soutenir le M23 en armes et en troupes, rejette ces allégations, affirmant agir en légitime défense face à l’armée congolaise et à des milices hostiles à Kigali. Les tensions se sont aggravées avec la rupture, le 17 mars, des relations diplomatiques entre le Rwanda et la Belgique, que Kigali accuse de l’avoir « constamment affaiblie » dans ce conflit.
Le Conseil de gouvernance du Rwanda (RGB) a interdit aux ONG locales et internationales opérant dans le pays, ainsi qu’aux organisations confessionnelles et entreprises d’intérêt général, toute coopération avec des institutions belges. « Tout projet ou accord en cours avec le gouvernement belge doit être immédiatement résilié », a déclaré le RGB jeudi, menaçant de « lourdes sanctions » en cas de non-respect.
Pelly Prudence Iraguha, militante politique et des droits humains, a critiqué cette décision, estimant qu’elle aurait dû être soumise au Parlement. Doris Uwicyeza Picard, directrice générale du RGB, a toutefois défendu cette mesure sur X, arguant que les lois en vigueur donnent à son institution le pouvoir de suspendre les ONG menaçant l’unité ou la sécurité nationale.