Les regards du monde entier se tournent vers Charm el-Cheikh, où s’ouvrent ce lundi de délicates négociations entre Israël et le Hamas sous l’égide de médiateurs égyptiens et qataris, épaulés par l’envoyé spécial américain Steve Witkoff. Ces pourparlers, parmi les plus sensibles depuis le début du conflit en 2023, s’inscrivent dans le cadre du « plan de paix » élaboré par le président américain Donald Trump, qui entend mettre fin à près de deux ans d’affrontements meurtriers dans la bande de Gaza.
Le plan prévoit trois étapes majeures : la libération de tous les otages israéliens détenus par le Hamas, un vaste échange de prisonniers palestiniens, et la mise en place d’un gouvernement de transition sous supervision internationale — que dirigerait l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair.
La délégation israélienne est conduite par Ron Dermer, proche conseiller de Benjamin Netanyahu, tandis que le Hamas a dépêché son négociateur en chef, Khalil al-Hayya, dont la présence à Charm el-Cheikh marque la première apparition publique depuis la tentative d’assassinat qu’il a subie à Doha en septembre.
Dans un communiqué diffusé la veille, le Hamas s’est dit prêt à un échange immédiat d’otages et de prisonniers, tout en demandant des « consultations supplémentaires » sur certaines clauses du plan Trump, notamment celles relatives au désarmement du mouvement et à la présence militaire israélienne à Gaza. Israël, de son côté, exige une acceptation totale et immédiate des conditions américaines, considérant toute réserve comme un obstacle à la paix.
Le secrétaire d’État américain Marco Rubio a exhorté Tel-Aviv à suspendre ses opérations militaires dans la bande de Gaza, estimant qu’un échange de prisonniers est « impossible tant que les bombardements se poursuivent ». Washington mise sur un cessez-le-feu rapide pour enclencher un processus politique de stabilisation régionale, soutenu par Le Caire et Doha.
Ces discussions interviennent dans un contexte de forte pression diplomatique et populaire. À Tel-Aviv, des milliers de manifestants se sont rassemblés devant la résidence du Premier ministre pour réclamer un cessez-le-feu et la libération immédiate des otages. Dans le même temps, le monde arabe, notamment la Turquie et le Qatar, multiplie les appels à un arrêt définitif des hostilités et à un retrait des troupes israéliennes.
Mais la méfiance demeure. De nombreux observateurs rappellent que plusieurs tentatives de trêve ont échoué ces deux dernières années, souvent brisées par des bombardements ou des désaccords sur les conditions de libération des prisonniers. Mustafa Barghouti, secrétaire général de l’Initiative nationale palestinienne, a d’ailleurs mis en garde contre « la tentation de Netanyahu de saboter les accords dès qu’ils menacent ses positions politiques internes ».
Alors que Donald Trump pousse pour une « avancée rapide et historique », certains craignent qu’un accord partiel, sans garanties de retrait et sans mécanisme de reconstruction pour Gaza, ne fasse qu’ouvrir une nouvelle phase d’instabilité.
Entre calculs politiques, pression internationale et exaspération populaire, Charm el-Cheikh devient ainsi le théâtre d’une énième tentative de paix au Proche-Orient — fragile, incertaine, mais porteuse d’un mince espoir après deux années de guerre et plus de 67 000 morts palestiniens.