Le 27 décembre 2025, le mouvement jihadiste somalien Al-Shabaab, affilié à Al-Qaïda, a publié un communiqué virulent promettant de s’opposer fermement à toute tentative d’Israël de « revendiquer ou d’utiliser des parties du Somaliland ». « Nous n’accepterons pas cela et nous le combattrons », a déclaré le groupe, accusant Israël d’avoir « décidé d’étendre son influence sur certaines parties du territoire somalien » afin de soutenir « l’administration apostate dans les régions du nord-ouest ». Cette menace intervient au lendemain de l’annonce historique faite par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu : Israël devient le premier pays au monde à reconnaître officiellement la République autoproclamée du Somaliland comme un État indépendant et souverain.
Cette décision, signée le 26 décembre par Netanyahu, le ministre des Affaires étrangères Gideon Sa’ar et le président du Somaliland Abdirahman Mohamed Abdullahi (connu sous le nom d’Abdirahman Cirro), marque un tournant diplomatique majeur. Elle établit des relations diplomatiques complètes, incluant l’ouverture d’ambassades et la nomination d’ambassadeurs dans les deux capitales – Jérusalem et Hargeisa. Netanyahu a qualifié cette reconnaissance d’« historique » et l’a inscrite « dans l’esprit des Accords d’Abraham », ces accords de normalisation signés en 2020 sous l’égide de l’administration Trump, qui ont permis à Israël d’établir des liens avec plusieurs pays arabes et musulmans. Israël prévoit une coopération immédiate dans les domaines de l’agriculture, de la santé, de la technologie et de l’économie.
Pour le Somaliland, région qui a déclaré son indépendance en 1991 après la chute du dictateur Siad Barre et l’effondrement de l’État somalien, cette reconnaissance représente une percée diplomatique après plus de trois décennies d’isolement international. Malgré une stabilité relative, une monnaie propre, un passeport et des institutions fonctionnelles, le Somaliland n’avait jusqu’alors été reconnu par aucun membre des Nations unies. Le président Abdullahi a salué un « moment historique » et exprimé la volonté de son pays de rejoindre les Accords d’Abraham, soulignant un partenariat stratégique pour la paix régionale et la prospérité mutuelle. À Hargeisa, la capitale, des foules ont célébré dans les rues, illuminant même le centre-ville aux couleurs du drapeau israélien.
Cependant, cette avancée a immédiatement provoqué une vague de condamnations dans la région de la Corne de l’Afrique et au-delà. Le gouvernement fédéral somalien, basé à Mogadiscio, a qualifié la décision israélienne d’« agression délibérée » et d’« étape illégale » portant atteinte à sa souveraineté. Il a réaffirmé que le Somaliland reste une partie « intégrante, inséparable et inaliénable » de la Somalie et promis de prendre toutes les mesures diplomatiques, politiques et légales pour défendre son intégrité territoriale.
L’Union africaine (UA) a fermement rejeté toute reconnaissance du Somaliland, son président Mahamoud Ali Youssouf rappelant que la région « reste une partie intégrante de la République fédérale de Somalie ». L’UA a averti que de telles initiatives risquaient de créer un « précédent dangereux » avec des implications graves pour la paix et la stabilité sur le continent.
Les réactions les plus vives sont venues des pays voisins et alliés de la Somalie. L’Égypte, la Turquie, Djibouti et la Somalie ont coordonné leurs positions lors d’appels téléphoniques entre leurs ministres des Affaires étrangères. Ils ont unanimement condamné la reconnaissance israélienne comme une « ingérence flagrante » et un « précédent dangereux » violant la Charte des Nations unies et les principes de l’UA sur l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation. L’Égypte a particulièrement souligné le risque pour la stabilité régionale, tandis que la Turquie a dénoncé une « politique expansionniste » d’Israël alignée sur ses efforts pour empêcher la reconnaissance d’un État palestinien.
Sur le plan géopolitique, le Somaliland occupe une position clé sur le golfe d’Aden, près du détroit de Bab el-Mandeb, vital pour le commerce maritime mondial et proche du Yémen, où les rebelles houthis soutenus par l’Iran menacent la navigation. Pour Israël, ce partenariat pourrait renforcer sa présence dans la mer Rouge et contrer les influences iraniennes et chinoises dans la région. Des analystes notent que des contacts discrets entre Israël et le Somaliland remontent à plusieurs années, avec des visites secrètes et des discussions sur une coopération sécuritaire.
La menace d’Al-Shabaab ajoute une dimension sécuritaire explosive. Actif principalement dans le sud et le centre de la Somalie, le groupe jihadiste contrôle encore des zones rurales et mène des attentats réguliers contre les forces somaliennes et la mission de l’UA (ATMIS). Bien que son influence soit limitée au Somaliland, stable et hostile aux extrémismes, cette déclaration pourrait galvaniser des recrutements ou inciter à des actions transfrontalières. Elle illustre comment un événement diplomatique peut exacerber les tensions dans une région déjà fragile, marquée par la piraterie, les conflits ethniques et les ingérences étrangères.


























