Près de trois ans après leur acquittement en première instance, Michel Platini et l’ancien président de la FIFA, Sepp Blatter, sont de retour devant la justice suisse. Depuis lundi matin, la Cour d’appel extraordinaire du Tribunal pénal fédéral de Muttenz (nord-ouest de la Suisse) examine une affaire qui a secoué le monde du football : un paiement suspect de 2 millions de francs suisses (1,8 million d’euros) en faveur de Michel Platini. Ce procès, qui se déroule jusqu’à jeudi soir, pourrait aboutir à une peine maximale de cinq ans de prison pour les deux accusés. La décision finale est attendue le 25 mars.
Sepp Blatter, aujourd’hui âgé de 88 ans, a réaffirmé son innocence devant les juges. Il est revenu sur son alliance avec Michel Platini en 1998, lorsqu’il briguait la présidence de la FIFA et souhaitait faire du Français son conseiller. Selon ses dires, Platini aurait exigé « un million » pour ses services, sans qu’aucun document écrit ne formalise cet accord.
Ce point est au cœur du dossier judiciaire. Le parquet suisse accuse les deux hommes d’ »escroquerie », « gestion déloyale », « abus de confiance » et « faux dans les titres ». En 2022, la justice avait estimé que l’accusation ne reposait pas sur une « vraisemblance confinant à la certitude », les relaxant alors au bénéfice du doute. L’appel du parquet relance donc un débat complexe sur la nature de ce versement tardif.
Les faits ne sont pas contestés : Michel Platini a bel et bien occupé le poste de conseiller de Sepp Blatter entre 1998 et 2002, avec un contrat prévoyant une rémunération annuelle de 300 000 francs suisses, payée intégralement à l’époque. Or, en janvier 2011, soit huit ans après la fin de cette collaboration, Platini a réclamé un paiement de 2 millions de francs suisses, somme qui lui a été versée avec l’approbation de Sepp Blatter.
Pour le parquet, ce versement est frauduleux, obtenu en trompant les contrôles internes de la FIFA. De leur côté, les accusés affirment que ce paiement découle d’un « accord de gentlemen » conclu oralement dès 1998, mais différé en raison des finances de l’organisation. Michel Platini, aujourd’hui âgé de 69 ans, a maintenu que Sepp Blatter lui avait promis ce montant dès le début de leur collaboration, un argument réitéré par l’ancien président de la FIFA, qui a affirmé lundi que « Platini valait son million ».
Ce procès en appel ravive également des tensions autour de l’actuel président de la FIFA, Gianni Infantino. Ce dernier, ancien bras droit de Platini à l’UEFA et élu à la tête de la FIFA en 2016, a longtemps été soupçonné d’avoir joué un rôle dans le déclenchement de cette enquête. En 2020, il a fait l’objet d’une procédure judiciaire en Suisse pour des rencontres secrètes avec l’ex-procureur en charge du dossier Platini-Blatter, mais cette enquête a été classée sans suite en 2023.
Les audiences se poursuivront jusqu’à jeudi, mais l’issue de ce procès en appel reste incertaine. Si la justice suisse décide de confirmer l’acquittement de Platini et Blatter, cela mettra un terme définitif à une saga judiciaire qui dure depuis près d’une décennie. En revanche, une condamnation pourrait bouleverser l’image de ces deux figures majeures du football mondial et rouvrir d’autres volets de l’affaire.
En attendant le verdict du 25 mars, ce procès rappelle combien le football international reste marqué par les affaires judiciaires et les jeux de pouvoir en coulisses.