La Corée du Nord a discrètement construit une base militaire destinée aux missiles balistiques à longue portée à seulement 27 kilomètres de sa frontière avec la Chine, selon un rapport récent du Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS) basé à Washington. La base, située dans le village de Sinpung-dong, dans la province de Pyongan du Nord, pourrait accueillir entre six et neuf missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) à capacité nucléaire, représentant une menace directe pour l’Asie de l’Est et le continent américain.
La construction de l’installation aurait commencé vers 2004 et elle serait devenue opérationnelle en 2014. Depuis, elle a été progressivement modernisée et agrandie, mais son existence est restée inconnue jusqu’à ce que le CSIS en confirme la présence grâce à des images satellites, des documents déclassifiés et des analyses en sources ouvertes. La base fait partie d’un réseau de 15 à 20 installations nord-coréennes de missiles balistiques jamais révélées publiquement.
Les images satellites révèlent un complexe souterrain sophistiqué comprenant des casernes, garages, installations de maintenance, entrepôts logistiques et tunnels pour le stockage et l’assemblage des ogives et missiles. L’installation peut héberger plusieurs centaines de soldats et d’officiers, avec des bureaux administratifs, des logements et des zones d’entraînement.
Ce qui distingue Sinpung-dong, c’est l’absence de rampes de lancement fixes ou de systèmes de défense aérienne à proximité. Selon le CSIS, la base est conçue pour abriter des ICBM mobiles à propergol solide, transportables par camion et pouvant être lancés depuis différents points pour éviter toute détection. Cette mobilité rend toute frappe préventive difficile et renforce la dissuasion nucléaire de Pyongyang.
« Sinpung-dong est l’installation la plus difficile à détecter jusqu’à présent », explique Jennifer Jun, co-auteure du rapport. Victor Cha, ancien responsable du Conseil de sécurité nationale des États-Unis, ajoute : « La Corée du Nord peut lancer ces missiles très rapidement, rendant leur destruction par des forces extérieures extrêmement complexe. »
Cette découverte survient dans un contexte où Kim Jong Un a intensifié le programme nucléaire nord-coréen depuis l’échec du sommet de 2019 avec les États-Unis, appelant à une « expansion rapide » des capacités nucléaires du pays. La proximité de la base avec la frontière chinoise est stratégique : elle protège le site et complique toute intervention militaire extérieure.
La base de Sinpung-dong illustre l’évolution continue de la stratégie de missiles balistiques de Pyongyang et son rôle central dans les ambitions nucléaires de la Corée du Nord, tout en soulignant les défis persistants pour la stabilité régionale et les efforts internationaux de dénucléarisation.