Les cours du pétrole brut repartent nettement à la hausse ce jeudi matin, portés par une recrudescence des tensions géopolitiques au Moyen-Orient et un nouveau tour de vis de la part des États-Unis à l’encontre de l’Iran. En début de séance européenne, le baril de WTI (West Texas Intermediate) s’affiche à 62,22 dollars, contre 61,95 dollars à la clôture de mercredi. Le Brent de la mer du Nord, de son côté, grimpe à 65,54 dollars, gagnant 20 cents par rapport à la veille.
Ce regain de vigueur sur les marchés pétroliers s’explique principalement par les nouvelles sanctions économiques imposées par l’administration Trump. Ciblant spécifiquement les exportations de pétrole iranien, ces mesures visent aussi des entités chinoises, dont une raffinerie indépendante identifiée comme un relais stratégique de Téhéran. En accentuant la pression sur la République islamique, Washington ravive le spectre d’un déséquilibre de l’offre mondiale, déjà mis à mal par les précédentes restrictions.
« La nouvelle salve de sanctions américaines, couplée aux déclarations fermes du Trésor, ont immédiatement ravivé les inquiétudes sur l’approvisionnement en brut », analyse Giovanni Stanovo, analyste énergie chez UBS. « Cette incertitude soutient mécaniquement les prix. »
À cette dimension géopolitique s’ajoutent des éléments plus techniques qui renforcent la dynamique haussière. Le recul du dollar américain joue un rôle clé : en rendant le pétrole moins cher pour les détenteurs d’autres devises, il stimule la demande mondiale. Tony Sycamore, analyste chez IG, évoque également une « couverture à court terme » sur les marchés et un « effet devise favorable dans un climat tendu ».
Mercredi déjà, le marché avait affiché une progression marquée : près de 2 % de hausse pour le WTI et le Brent, atteignant leurs plus hauts niveaux depuis le 3 avril. Cette poussée pourrait marquer le début d’une tendance haussière hebdomadaire, une première en près de trois mois.
Face à ce contexte mouvementé, l’OPEP et ses alliés de l’OPEP+ surveillent de près l’évolution des prix. L’organisation a confirmé avoir reçu des plans de compensation actualisés de la part de huit membres ayant récemment dépassé leurs quotas de production. Une tentative de stabilisation du marché, alors que les prix pourraient s’emballer davantage si la situation dégénère.
Cependant, des signaux contradictoires persistent. L’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA) a fait état mercredi d’une hausse des stocks de brut, contrastant avec une baisse des réserves d’essence et de distillats. Par ailleurs, les prévisions économiques mondiales restent fragiles, notamment en Chine, où certains analystes anticipent un recul du PIB de 3 à 4 % sur les prochains trimestres.
Dans ce climat, des institutions comme Goldman Sachs ou JPMorgan appellent à la prudence, révisant à la baisse leurs prévisions de prix et de croissance de la demande. Les perturbations liées aux guerres commerciales et la montée d’un protectionnisme tarifaire global pourraient freiner les dynamiques actuelles.
À la veille du week-end prolongé de Pâques, les marchés restent volatils et sensibles à toute évolution. Les opérateurs sont suspendus à la réaction de l’Iran, aux prises de position des acteurs asiatiques visés par les sanctions, et aux prochaines décisions de l’OPEP+ sur d’éventuels ajustements de production.
Si la tendance actuelle est haussière, la situation reste fragile et sujette à de brusques renversements. Le baril est plus que jamais au cœur d’un jeu d’équilibres entre diplomatie, économie et énergie, dans lequel la moindre étincelle pourrait faire flamber les marchés.