Une nouvelle tragédie secoue le centre du Nigeria. Au moins 56 personnes ont été tuées dans la nuit de jeudi à vendredi lors d’attaques perpétrées dans l’État de Benue, a annoncé ce samedi un responsable du bureau du gouverneur, révisant un premier bilan qui faisait état de 17 victimes.
Le conseiller média Solomon Iorpev, s’exprimant auprès de l’AFP, a précisé que « le bilan pourrait encore s’alourdir alors que les opérations de recherche et de sauvetage se poursuivent ». Ces violences, survenues dans les zones gouvernementales locales d’Ukum et de Logo, ont été attribuées par les autorités à des « bergers présumés », une expression souvent utilisée dans la région pour désigner les milices armées issues de la communauté fulani.
L’État de Benue, situé dans la ceinture médiane du pays, est régulièrement le théâtre de conflits entre éleveurs nomades et agriculteurs sédentaires. À la racine de ces affrontements : l’accès aux terres agricoles, de plus en plus rares. Si ces tensions sont d’abord économiques et environnementales, elles prennent souvent une tournure ethnique ou religieuse. Les éleveurs, majoritairement musulmans et issus de l’ethnie fulani, sont souvent perçus comme des intrus par les communautés chrétiennes locales, largement agricoles.
Avec la réduction des terres cultivables due au changement climatique, à la croissance démographique et à l’expansion urbaine, la concurrence pour les ressources s’est intensifiée. Le centre du Nigeria, à la croisée des routes commerciales et culturelles, est devenu un foyer d’instabilité où les rivalités ancestrales sont attisées par des groupes armés et parfois même des extrémistes religieux.
Ces attaques surviennent quelques semaines seulement après un massacre similaire dans l’État voisin du Plateau, où plus de 100 personnes avaient perdu la vie. L’insécurité croissante dans la région est devenue une source d’inquiétude majeure pour le gouvernement fédéral et pour les observateurs internationaux. Le gouverneur de Benue, Hyacinth Alia, s’est rendu sur les lieux des attaques et a appelé à une réponse ferme des autorités centrales.
« La province de Benue est stratégique pour la sécurité alimentaire du Nigeria. Si nous perdons cette région, nous compromettons l’autosuffisance du pays », a déclaré Solomon Iorpev. Il exhorte le gouvernement fédéral à renforcer la sécurité et à mettre en place des solutions durables au conflit agraire, notamment par la médiation communautaire, la démarcation claire des terres et l’instauration de zones de pâturage sécurisées.
Alors que les projecteurs médiatiques se tournent souvent vers le nord du Nigeria en raison de la menace persistante de Boko Haram et de l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), les violences intercommunautaires du centre, tout aussi meurtrières, reçoivent moins d’attention internationale. Les civils paient pourtant un lourd tribut, entre meurtres, déplacements massifs et destruction des moyens de subsistance.
Les habitants des zones attaquées vivent désormais dans la peur, beaucoup ayant fui leurs villages pour chercher refuge dans des zones plus sûres ou dans des camps de déplacés, souvent sous-équipés.