En Algérie, le contrôle étatique semble désormais ne connaître aucune limite. Après les voitures, les bus, le carburant et même les pneus, c’est désormais l’achat d’or et de bijoux qui est placé sous haute surveillance. De nouvelles restrictions viennent durcir les conditions d’acquisition de métaux et pierres précieuses, frappant directement la diaspora qui, depuis des décennies, se procure de l’or lors de ses séjours au pays.
Officiellement, ces mesures sont justifiées par la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Mais derrière ce vernis sécuritaire se cache surtout une volonté d’ingérence croissante de l’État dans la vie quotidienne et économique des Algériens. Chaque bijou dépassant deux millions de dinars (environ 7 600 €) doit désormais être tracé : passeport ou carte d’identité obligatoires, interdiction des ventes anonymes, identification du bénéficiaire final… Le luxe intime et familial se transforme en dossier administratif.
Pour la diaspora, ces nouvelles règles ne représentent pas seulement une contrainte logistique : elles symbolisent une rupture culturelle et économique. Offrir un bijou à un proche, investir dans une valeur refuge ou marquer un lien avec le pays devient un geste suspect aux yeux de l’administration. Ce qui était auparavant un rituel de transmission et de sécurité financière se transforme en acte sous surveillance.
Sociologiquement, cette décision renforce un climat de méfiance. Elle installe l’idée que chaque transaction pourrait être douteuse, et alourdit la charge bureaucratique pour des commerçants déjà fragilisés par la concurrence de l’informel. La conséquence risque d’être une migration des achats vers le marché noir, au détriment de l’économie légale et de la sécurité financière des citoyens.
Politiquement, ce durcissement illustre la logique centralisatrice du pouvoir algérien, où l’économie est avant tout perçue comme un instrument de contrôle social. Plutôt que de faciliter l’investissement et le lien avec la diaspora, l’État choisit la surveillance. Acheter une voiture, un bus… ou même un simple collier en or devient ainsi un acte hautement politique, soumis à l’arbitraire administratif.
Au final, cette mesure révèle une réalité inquiétante : en Algérie, chaque geste du quotidien, aussi intime soit-il, peut être transformé en instrument de contrôle. Entre sécurité officielle et intrusion bureaucratique, le citoyen et la diaspora se retrouvent pris au piège d’un État qui surveille tout, jusqu’aux coffres à bijoux.