Hama / Damas – 15 novembre 2025
Les nouvelles autorités syriennes ont annoncé l’arrestation du général pilote Hamza Mohammad Al-Yassine, figure impliquée dans certaines des opérations aériennes les plus meurtrières menées durant les dernières années du régime déchu. Présentée comme un acte fort de justice, cette interpellation s’inscrit pourtant dans un paysage politique marqué par les zones d’ombre, les règlements de comptes internes et l’absence persistante d’un véritable processus judiciaire indépendant.
Selon la sécurité intérieure du gouvernorat de Hama, Al-Yassine aurait joué un rôle central dans des frappes aériennes contre des zones insurgées à Idleb et Hama, causant des massacres répétés parmi les civils. Mais si les charges semblent lourdes, la manière dont elles sont instruites demeure opaque : aucune information sur les preuves, aucune transparence sur les procédures, aucune garantie d’un procès équitable.
L’arrestation d’Al-Yassine intervient quelques mois après celle, très médiatisée, du général Mizar Sawane, ancien chef de la 20e division aérienne, visé depuis longtemps par des sanctions européennes et britanniques. Arrêté à Harasta, Sawane était accusé d’avoir dirigé des bombardements massifs contre la Ghouta, l’un des épisodes les plus tragiques de la guerre civile.
Pourtant, selon plusieurs observateurs, ces arrestations s’intègrent dans une stratégie politique sélective, qui cible surtout les officiers affaiblis, marginalisés ou devenus embarrassants pour le nouveau pouvoir. Ceux qui disposent encore d’influence, de réseaux ou d’alliances sont pour l’instant épargnés — voire intégrés dans les nouvelles structures sécuritaires.
Les ONG et organisations humanitaires dénoncent une justice ni transparente, ni indépendante, incapable de garantir la vérité et la responsabilité. L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) rappelle que des dizaines de hauts responsables ont fui le pays dès la chute du régime en décembre 2024, alors que Bachar el-Assad lui-même a trouvé refuge à Moscou.
Dans ce contexte, l’arrestation de quelques généraux médiatisés apparaît davantage comme une opération défensive visant à légitimer le nouveau pouvoir que comme un véritable tournant judiciaire. Le système qui a permis les crimes semble rester intact, seuls ses visages visibles étant sacrifiés.
En l’absence d’un mécanisme national de justice transitionnelle, d’une commission vérité, d’une indépendance judiciaire garantie ou d’observateurs internationaux, la Syrie reste loin d’une véritable reddition des comptes.

























