De violents affrontements ont éclaté en Côte d’Ivoire après la réélection du président, Alassane Ouattara, tandis que la France et d’autres pays d’Afrique de l’Ouest appellent au dialogue pour mettre fin aux tensions. Ouattara a obtenu son deuxième mandat présidentiel lors des élections du 31 octobre, avec plus de 94% des voix, mais les chefs de l’opposition rejettent les résultats, accusant le chef de violer la Constitution, dépassant la limite de deux mandats consécutifs.
Les tensions ont ravivé les traumatismes vécus lors des élections de 2010, contestés par l’opposition et responsables du déclenchement d’une brève guerre civile dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, avec environ 3 000 victimes. Au moins trois personnes ont été tuées dans la ville de M’Batto, dans le centre-est, entre le lundi 9 et le mardi 10 novembre, lorsque les violences ont commencé, ont indiqué la police et les habitants. « La situation est désormais calme et des renforts patrouillent dans la zone », a déclaré un porte-parole de la police, confirmant le total de 3 morts et 26 blessés. Neuf autres personnes, selon des témoignages locaux, seraient décédées des suites des émeutes qui ont éclaté lundi dans deux autres villes du pays, immédiatement après que la Cour suprême a validé la victoire électorale d’Ouattara.
Plus de 8 000 Ivoiriens ont fui vers les pays voisins, craignant les conséquences des affrontements, a rapporté mardi 10 novembre l’agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), précisant que plus de 60% sont des enfants. La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a adressé ses «chaleureuses félicitations» à Ouattara, mais le groupe des 15 États membres a exhorté le président à rétablir la paix dans le pays après les troubles, qui durent depuis En août, ils ont fait au moins 50 victimes.
Ouattara, ancien économiste du Fonds monétaire international élu pour la première fois en 2010, a exhorté son principal rival, Henri Konan Bedie, à abandonner les manifestations et à tenir des pourparlers apaisants pour désamorcer la crise. « Je serai le président de tous les Ivoiriens », a-t-il déclaré lundi dans une émission nationale. Il n’y a eu aucune réponse officielle du principal parti d’opposition, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) ou de son patron Bedie.
Le domicile de ce dernier, situé à Abidjan, est toujours bloqué par les forces de sécurité. Deux autres dirigeants de l’opposition ont été arrêtés parce qu’ils étaient soupçonnés d’insurrection après avoir refusé le scrutin et annoncé la formation d’un gouvernement rival. «Nous ne reconnaissons pas l’élection. Nous savons tous que Ouattara a violé la constitution », a déclaré N’Goran Djiedri, chef d’une faction du PDCI. « Oui au dialogue, mais l’Etat de droit doit être respecté », a-t-il ajouté.
La CEDEAO a exhorté « tous les Ivoiriens à mettre la paix et la cohésion sociale au premier plan, notamment pour essayer de résoudre les différends par le dialogue et les voies légales ». L’ONU, l’UE et l’Union africaine ont également exhorté les négociations pour arrêter l’escalade des tensions en Côte d’Ivoire, qui est le premier producteur mondial de cacao, la plus grande économie francophone d’Afrique de l’Ouest et un centre d’affaires important. Des diplomates occidentaux et des sources gouvernementales ont révélé que des pourparlers avec les deux parties sont déjà en cours, bien qu’aucun progrès concret n’ait été réalisé jusqu’à présent.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a souligné que la France estime que l’offre de dialogue avec Ouattara va « dans la bonne direction », mais espère que « les faits contribueront à la pacification ». « Bedie et Ouattara pourraient se rencontrer pour ramener les tensions à un niveau inférieur », a déclaré un diplomate occidental au journal al-Jazeera. « La vraie discussion doit avoir lieu entre ces deux dirigeants », a-t-il ajouté.
Les opposants à Ouattara pensent que Ouattara enfreint la loi en décidant de rester pour son troisième mandat consécutif, mais le président s’est défendu en déclarant que son rôle est pleinement légitime après l’approbation de certains amendements constitutionnels en 2016, notamment y compris celui sur la limite des mandats présidentiels.
La violence électorale en Côte d’Ivoire n’est pas nouvelle. En 2010, de violents troubles ont éclaté lorsque l’ancien président Laurent Gbagbo a refusé de céder le pouvoir à Ouattara après avoir perdu l’élection présidentielle de cette année-là. Les affrontements qui ont suivi ont divisé le nord et le sud du pays.