La récente officialisation de la Confédération des États du Sahel (CES) par les régimes militaires du Burkina Faso, du Mali et du Niger, lors de leur premier sommet à Niamey, marque un tournant majeur dans la géopolitique de l’Afrique de l’Ouest. Cette décision, qui entérine leur alliance, scelle également une rupture définitive avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Depuis les coups d’État successifs qui ont porté les militaires au pouvoir dans ces trois pays, les relations avec la CEDEAO se sont progressivement détériorées. Les dirigeants de la CES accusent la CEDEAO d’être instrumentalisée par la France, l’ancienne puissance coloniale, et de ne pas servir les intérêts des peuples sahéliens. Cette perception a été exacerbée par les lourdes sanctions économiques imposées par la CEDEAO après le coup d’État au Niger en juillet 2023, et la menace d’une intervention militaire pour rétablir le président déchu, Mohamed Bazoum.
La création de la CES vise à établir une intégration plus poussée entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Les chefs d’État de ces pays ont adopté un traité instituant cette confédération, soulignant la volonté de construire une communauté souveraine des peuples, éloignée de la mainmise des puissances étrangères. Cette nouvelle structure entend mutualiser les moyens dans des secteurs stratégiques tels que l’agriculture, l’eau, l’énergie, et les transports, et renforcer l’usage des langues locales dans les médias.
La CES doit maintenant faire face à plusieurs défis, tant internes qu’externes. Sur le plan sécuritaire, la lutte contre les groupes jihadistes reste une priorité, d’où la formation d’une force commune en mars dernier. Sur le plan économique et social, la confédération prévoit la création d’une banque d’investissement et d’un fonds de stabilisation pour soutenir le développement régional.
Diplomatiquement, la CES devra naviguer dans un environnement complexe, marqué par des relations tendues avec la CEDEAO et une nécessaire coordination avec d’autres acteurs régionaux et internationaux. Le sommet de la CEDEAO prévu à Abuja, où les rapports avec la CES seront discutés, sera un test crucial pour évaluer la réponse de la communauté ouest-africaine à cette nouvelle configuration.
La création de la Confédération des États du Sahel symbolise une rupture irrévocable avec la CEDEAO et ouvre la voie à une nouvelle ère de coopération régionale entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Si cette initiative représente une tentative audacieuse de redéfinir les relations géopolitiques en Afrique de l’Ouest, son succès dépendra de la capacité des trois pays à surmonter les nombreux défis sécuritaires, économiques et diplomatiques qui se profilent à l’horizon.