Le climat politique en Turquie est plus tendu que jamais. Alors que le pays traverse une période de turbulences sociales et politiques, le chef du principal parti d’opposition, le Parti républicain du peuple (CHP), Özgür Özel, a lancé un appel urgent à la tenue d’élections anticipées. Dans une déclaration faite le 6 avril 2025, il a demandé à ce que les élections aient lieu « au plus tard en novembre », en raison des troubles politiques qui secouent actuellement la Turquie.
Cette demande d’élections précoces intervient dans un contexte de mécontentement croissant après l’arrestation d’Ekrem İmamoğlu, maire d’Istanbul et candidat du CHP à la présidence. İmamoğlu, figure de l’opposition, a été arrêté fin mars 2025, et cette action a déclenché des manifestations massives dans tout le pays, principalement à Istanbul. Pour de nombreux Turcs, son arrestation a symbolisé un coup de force politique, et un nouveau tournant dans l’éradication des opposants au régime du président Recep Tayyip Erdoğan.
Özel, s’adressant directement à Erdoğan, a déclaré : « Au plus tard en novembre, vous viendrez affronter notre candidat. » Il faisait référence à İmamoğlu, qui a été élu maire d’Istanbul en 2019, battant Erdoğan dans l’une des villes les plus importantes du pays. L’appel à des élections anticipées reflète la frustration de l’opposition face à l’autoritarisme croissant de l’actuel gouvernement.
Dans sa déclaration, Özel a ajouté : « Nous vous défierons. Nous voulons notre candidat à nos côtés. » Ces propos s’inscrivent dans un contexte où le peuple turc, déjà profondément divisé sur la question de la gestion du pays, semble avoir atteint un point de rupture. Les manifestations qui ont suivi l’arrestation d’İmamoğlu ont été qualifiées par le CHP de « plus grande motion de censure de l’histoire de la Turquie ».
Depuis cette arrestation, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues d’Istanbul, d’Ankara, d’Izmir et d’autres grandes villes pour exprimer leur colère et leur refus de l’autoritarisme de plus en plus visible du gouvernement. Les manifestants, tout en réclamant la libération d’İmamoğlu, ont dénoncé ce qu’ils considèrent comme un « coup d’État » en cours, mené par un président Erdoğan qui, selon eux, utilise les institutions de l’État pour écraser toute forme d’opposition.
Cependant, les autorités ont réagi avec une répression sévère. Le gouvernement turc a déployé les forces de l’ordre pour disperser les rassemblements et a procédé à l’arrestation de près de 2 000 personnes. Parmi ces détenus, de nombreux jeunes, étudiants et journalistes ont été arrêtés pour avoir pris part aux manifestations ou pour avoir exprimé des opinions critiques envers le gouvernement. Cette répression a non seulement exacerbé les tensions internes, mais a également attiré les critiques internationales des défenseurs des droits humains qui accusent la Turquie de réprimer la liberté d’expression et de réunion.
La situation politique actuelle en Turquie n’est pas seulement un défi pour le gouvernement d’Erdoğan, mais aussi pour l’opposition, qui doit maintenant naviguer dans un contexte où les libertés publiques sont de plus en plus restreintes. Dans son discours, Özel a exprimé la détermination de l’opposition à défendre la démocratie, affirmant : « Nous ne laisserons pas ce pays sombrer dans l’obscurité de la répression et de l’injustice. Nous demanderons aux citoyens de faire entendre leur voix dans les urnes. »
Le rejet d’İmamoğlu par le gouvernement et la montée des tensions qui en ont résulté mettent en lumière un problème plus large en Turquie : l’effritement des institutions démocratiques. Les élections présidentielles et législatives prévues pour 2026 semblent désormais être un test crucial pour la Turquie, dont l’équilibre politique est de plus en plus fragilisé. Alors que le pays fait face à une série de défis économiques, sociaux et politiques, les appels à une nouvelle élection sont une tentative de redonner la parole au peuple, et de remettre en question le contrôle grandissant d’Erdoğan sur les affaires du pays.
Les défis économiques, notamment la crise de la livre turque, l’inflation galopante et le chômage élevé, ont exacerbé la méfiance envers le gouvernement. En réponse à ces problèmes économiques, Erdoğan et son gouvernement ont promu une série de réformes, mais leur efficacité a été mise en doute. Le mécontentement économique est devenu un facteur de plus en plus important qui nourrit les manifestations de rue. La politique étrangère turque, marquée par des tensions avec l’UE, les États-Unis et ses voisins, ajoute également une couche de complexité à la situation intérieure du pays.
Pour l’opposition, l’arrestation d’İmamoğlu a servi de catalyseur pour une résistance plus large contre ce qu’ils considèrent comme un régime qui perd de plus en plus de sa légitimité populaire. Cependant, malgré la pression croissante, Erdoğan continue de se maintenir au pouvoir grâce à une structure de soutien étendue, notamment dans les régions rurales et parmi ses bases conservatrices. Mais à mesure que le climat politique se dégrade et que l’opposition devient plus unie, les élections anticipées deviennent de plus en plus probables, bien que la situation reste incertaine.