Alors que l’Asie du Sud a récemment frôlé une nouvelle conflagration, la Chine a clairement affiché, mardi 20 mai, son soutien indéfectible au Pakistan pour « la défense de sa souveraineté et de son intégrité territoriale ». Cette déclaration, émise à l’issue d’une rencontre entre le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, et son homologue pakistanais Mohammad Ishaq Dar, intervient dans un contexte régional explosif et témoigne de la volonté de Pékin de consolider son partenariat stratégique avec Islamabad.
Wang Yi a qualifié le Pakistan d’« ami à toute épreuve », réaffirmant que la coopération bilatérale serait renforcée « dans tous les domaines stratégiques ». Cette alliance, enracinée dans une longue histoire de coopération militaire, économique et diplomatique, se voit aujourd’hui consolidée face à la montée des tensions militaires entre l’Inde et le Pakistan, notamment au sujet du Cachemire.
Du 6 au 10 mai, les deux puissances nucléaires ont été à deux doigts d’un nouveau conflit armé. En cause : une frappe meurtrière attribuée à un groupe jihadiste au Cachemire indien qui a causé 26 morts le 22 avril à Pahalgam. L’Inde a aussitôt répliqué par des tirs de missiles sur des cibles situées au Pakistan, qu’elle soupçonne d’abriter les auteurs de l’attentat. Islamabad, niant toute implication, a répondu militairement, entraînant pendant plusieurs jours un cycle de frappes et contre-frappes, notamment via l’utilisation de drones et d’artillerie.
L’intervention diplomatique de Donald Trump, qui a surpris plus d’un observateur en annonçant un cessez-le-feu immédiat le 10 mai, a permis d’éviter l’escalade. Mais cet épisode a révélé une fois encore l’extrême fragilité de la région, où les équilibres militaires, historiques et confessionnels sont en constante tension.
C’est dans ce climat que Pékin a choisi de réaffirmer publiquement son soutien à son allié pakistanais. Un geste hautement symbolique, mais aussi stratégique : le Pakistan absorbe aujourd’hui environ 63% des exportations d’armement chinois, selon les données du Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI). Pékin voit en Islamabad un partenaire clé dans sa stratégie de contournement de l’Inde et dans le déploiement de son initiative des Nouvelles Routes de la Soie, notamment via le China-Pakistan Economic Corridor (CPEC), dont l’axe traverse des zones sensibles du Cachemire contesté.
Pour la Chine, qui entretient des relations tendues avec l’Inde, le renforcement de l’axe sino-pakistanais permet aussi de peser sur l’équilibre des forces en Asie du Sud. Pékin continue cependant d’appeler officiellement à la retenue : dans une déclaration parallèle, les autorités chinoises ont exhorté « fermement » l’Inde et le Pakistan à éviter toute nouvelle escalade.
Cette posture ambiguë illustre bien la stratégie chinoise : présenter un visage pacificateur sur la scène internationale tout en consolidant, dans les faits, une alliance militaire active avec un pays en conflit ouvert – diplomatique, voire militaire – avec son rival indien.
La déclaration de soutien à Islamabad risque d’accentuer les tensions entre Pékin et New Delhi, à un moment où les relations sino-indiennes sont déjà fragilisées par les différends frontaliers dans l’Himalaya. Du côté indien, cette prise de position sera vraisemblablement perçue comme une provocation et une tentative d’encerclement stratégique, dans un contexte où l’Inde cherche à renforcer ses partenariats avec les puissances occidentales, notamment au sein du Quad (États-Unis, Japon, Australie, Inde).