Kampala, 29 juin 2025 — À 80 ans, Yoweri Museveni ne compte pas raccrocher. Le président ougandais a officiellement confirmé sa volonté de se représenter à la prochaine élection présidentielle prévue pour janvier 2026. Une décision qui ouvre la voie à une prolongation de son règne déjà long de près de quatre décennies — un record sur le continent africain.
« J’ai exprimé mon intérêt à être le porte-drapeau présidentiel du Mouvement de résistance nationale (NRM) », a déclaré Museveni samedi soir, actant sa volonté de briguer un nouveau mandat. Ce n’est pas une surprise : son parti, au pouvoir depuis 1986, a modifié la Constitution à deux reprises pour supprimer les limites d’âge et de mandat, balisant la route à une présidence indéfinie.
S’appuyant sur son discours de stabilité, Museveni promet un avenir radieux. Il affirme vouloir faire passer le PIB de l’Ouganda de 66 milliards à 500 milliards de dollars dans les cinq prochaines années — une projection qualifiée d’irréaliste par de nombreux économistes, mais politiquement puissante auprès d’une base en quête d’opportunités économiques.
Derrière le vernis économique, la dérive autoritaire du régime est régulièrement dénoncée. Museveni est accusé par des organisations comme Human Rights Watch d’utiliser les institutions de l’État pour museler toute opposition. Ces dernières années, des opposants politiques et militants ont été poursuivis devant des tribunaux militaires, bien que cette pratique ait été jugée inconstitutionnelle par la Cour suprême en janvier 2025.
Pourtant, le Parlement ougandais a récemment adopté une loi permettant à ces juridictions militaires de continuer à juger des civils, provoquant la colère des ONG et de l’opposition, qui y voient un outil de répression déguisé.
Face au président sortant, Robert Kyagulanyi, plus connu sous le nom de Bobi Wine, revient dans l’arène. L’ancien chanteur devenu figure de proue de l’opposition a confirmé sa candidature, dénonçant d’ores et déjà un climat électoral biaisé. Lors de la présidentielle de 2021, il avait été assigné à résidence, ses partisans harcelés, et ses résultats balayés au profit de Museveni, au terme d’un scrutin entaché d’allégations de fraudes massives.
« Ce régime a peur du peuple », a-t-il récemment déclaré, affirmant que les prochaines élections seraient « une bataille pour la démocratie ».
Le recours systématique aux tribunaux militaires, la répression des médias, la surveillance des opposants et l’usage massif de la sécurité d’État ont transformé le système politique ougandais en un autoritarisme déguisé, selon plusieurs analystes. Oryem Nyeko, chercheur principal à HRW, estime que « les autorités ougandaises utilisent abusivement les institutions judiciaires pour étouffer toute voix dissidente ».
l’Ouganda est-il prêt à tourner la page de l’ère Museveni ? Le chef d’État, fort de l’appareil sécuritaire, de l’État et de son parti hégémonique, garde une longueur d’avance. Mais la jeunesse urbaine, de plus en plus politisée, pourrait à nouveau faire entendre sa voix derrière le slogan de Bobi Wine : “People Power, Our Power”.