Londres / Paris, juillet 2025 — La France et le Royaume-Uni ont annoncé, à l’issue d’une visite d’État d’Emmanuel Macron à Londres, un accord inédit sur la coordination de leurs forces de dissuasion nucléaire. Cette entente, saluée comme « historique » par le Premier ministre britannique Keir Starmer, marque une évolution majeure dans la doctrine sécuritaire européenne. Mais derrière les déclarations solennelles se dessine une question cruciale : l’Europe est-elle en train de se doter de son propre parapluie nucléaire, en marge de la protection américaine ?
Cette coordination — symbolisée par la signature de la « Déclaration Northwood » — repose sur un message clair : toute menace extrême contre le continent européen serait désormais susceptible d’une réponse conjointe franco-britannique. Une formulation stratégique qui, si elle n’équivaut pas à une intégration complète des arsenaux, envoie néanmoins un signal dissuasif, à la fois à Moscou et à Washington.
Selon Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique, il ne s’agit pas d’une rupture totale mais d’une inflexion significative. Les deux nations coopèrent déjà dans le domaine nucléaire depuis les années 1990. Ce qui change aujourd’hui, c’est la dimension opérationnelle évoquée : exercices conjoints, partage d’informations sensibles, et surtout, coordination dans la réponse stratégique.
Macron et Starmer assurent que chaque pays conserve sa souveraineté décisionnelle. Mais la simple idée qu’un adversaire potentiel puisse faire face à une double dissuasion synchronisée rend le signal politico-militaire bien plus fort.
La montée des incertitudes transatlantiques, amplifiée par les déclarations imprévisibles de Donald Trump sur l’OTAN et la sécurité européenne, joue un rôle de catalyseur. L’Europe ne sait plus à quoi s’en tenir quant à l’engagement de Washington. Dès lors, la coordination nucléaire franco-britannique devient, sinon un substitut, du moins une assurance complémentaire.
« Nous construisons l’armature d’un parapluie », résume Tertrais. Il ne s’agit pas de remplacer l’arsenal américain, mais d’anticiper son éventuel repli.
Dans ce contexte, les regards se tournent vers l’Allemagne, puissance majeure mais non nucléaire. Si Berlin ne peut rejoindre la coordination nucléaire, certains observateurs espèrent que cette initiative permettra de rassurer les Européens les plus exposés. À défaut de partage d’armes, une doctrine collective pourrait se dessiner à moyen terme.