Le 9 août 2025, Succès Masra, ancien Premier ministre tchadien et leader du principal parti d’opposition Les Transformateurs, a été condamné à vingt ans de prison ferme par le tribunal de grande instance de N’Djamena. Il a été reconnu coupable de « complicité de meurtre » et de « diffusion de messages à caractère haineux et xénophobe » dans le cadre du massacre de Mandakao, survenu en mai 2025, au cours duquel 42 personnes ont été tuées lors d’un violent conflit intercommunautaire.
Jugé aux côtés de 74 autres personnes, majoritairement issues de la communauté Ngambaye, Masra a vu un message audio qui lui est attribué présenté comme preuve majeure par la justice tchadienne. Ce message, en langue ngambaye, exhortait ses partisans à s’armer et à se défendre, et a été qualifié d’« incitation à la haine et à la révolte » par les autorités.
Tout au long du procès, ouvert le 6 août, Masra a nié toutes les accusations et annoncé son intention de faire appel de la décision. Son avocat a dénoncé un verdict reposant sur des suppositions, qualifiant cette condamnation d’« ignominie » et d’« humiliation indigne ».
Cette condamnation intervient dans un contexte politique tendu, alors que Masra s’était fermement opposé à la prolongation du mandat du président Mahamat Idriss Déby Itno, fils du défunt président Idriss Déby Itno, et avait contesté les résultats de la présidentielle de 2025, marquée par la réélection de Mahamat avec une large majorité.
Les partisans de Masra, principalement originaires de l’ethnie Ngambaye, une communauté historiquement marginalisée dans le sud du Tchad, ont organisé des rassemblements pour dénoncer cette décision judiciaire.
Le parquet avait initialement requis une peine de vingt-cinq ans de prison ferme pour Masra et les autres accusés, insistant sur la gravité des faits et la nécessité d’une sanction exemplaire. Toutefois, le tribunal a finalement prononcé une peine de vingt ans, considérant les preuves et circonstances de manière plus nuancée, et cherchant à trouver un équilibre entre fermeté et justice.
Cette affaire illustre les tensions persistantes au Tchad, entre un pouvoir consolidé et une opposition déterminée, dans un pays confronté à de profondes fractures communautaires et politiques.