Erevan, 18 août 2025 – Le président iranien Massoud Pezeshkian s’est rendu ce lundi en Arménie afin de s’entretenir avec les dirigeants locaux au sujet du projet de corridor de transit inclus dans l’accord de paix signé le 8 août à Washington entre Erevan et Bakou. Ce tracé, qui relierait l’Azerbaïdjan à son enclave du Nakhitchevan en traversant l’Arménie, est perçu par Téhéran comme une menace directe à ses intérêts stratégiques.
L’initiative, baptisée par ses promoteurs « Voie Trump pour la paix et la prospérité internationale » (TRIPP), accorde aux États-Unis des droits de développement exclusifs sur cette infrastructure. Pour Washington, il s’agit d’un levier diplomatique et économique majeur destiné à consolider une paix fragile dans le Caucase.
Mais pour l’Iran, ce corridor risquerait de l’isoler de l’Arménie et du reste du Caucase, tout en ouvrant la porte à une présence économique et sécuritaire américaine jugée « inquiétante ». Avant de quitter Téhéran, Pezeshkian a d’ailleurs déclaré à la télévision d’État :
« La présence d’entreprises américaines dans la région est préoccupante. Nous en discuterons et ferons part de nos préoccupations aux responsables arméniens. »
Depuis la signature de l’accord, les dirigeants iraniens multiplient les mises en garde. Le ministre des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a assuré lundi que les responsables arméniens avaient promis qu’aucune force américaine ni société de sécurité privée ne s’implanterait en Arménie sous couvert de ce projet.
Téhéran craint néanmoins que le corridor ne serve de prétexte à ce qu’il qualifie d’« objectifs hégémoniques » de Washington dans le Caucase. Cette rhétorique illustre la méfiance profonde de l’Iran face à tout rapprochement américano-caucasien.
La mise en place de ce corridor illustre la reconfiguration des équilibres dans une région marquée par des décennies de guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, notamment autour du Haut-Karabakh. Tandis que Bakou présente ce projet comme une victoire stratégique, Téhéran redoute un basculement qui affaiblirait son rôle régional et renforcerait la présence occidentale à ses frontières.
La visite de Massoud Pezeshkian à Erevan s’inscrit donc dans une logique de contrepoids ? l’Iran cherche à rappeler que, malgré l’accord de Washington, aucune décision dans le Caucase ne pourra ignorer ses intérêts sécuritaires et géopolitiques.