Les Émirats Arabes Unis (EAU), souvent perçus comme un havre de stabilité et de prospérité au Moyen-Orient, font à nouveau la une des journaux avec l’annonce du procès de plus de cent personnes accusées d’appartenir à une organisation criminelle présumée. Ces individus, accusés de blanchiment d’argent, d’extorsion et d’avoir formé une organisation criminelle connue sous le nom de « gang Bahloul », sont également poursuivis pour « atteinte à la sécurité de l’État ». La question qui se pose est de savoir si ce procès s’inscrit véritablement dans une démarche de protection de l’État, ou s’il s’agit d’une nouvelle manifestation de la répression politique dans un pays connu pour son contrôle strict de l’expression publique et des dissidences.
Le choix de juger ces individus devant la cour d’appel d’Abou Dhabi, sans préciser leurs nationalités, renforce l’opacité entourant cette affaire. Les autorités émiraties sont bien connues pour leur approche sévère envers toute forme de contestation ou de critique. Ainsi, ce procès soulève des questions quant à l’équilibre entre les préoccupations sécuritaires légitimes et l’usage de ces préoccupations pour justifier des mesures autoritaires.
Ce procès n’est pas un événement isolé. En juillet, 57 ressortissants bangladais ont été lourdement condamnés pour avoir manifesté en soutien à un mouvement de contestation dans leur pays d’origine. Quelques jours plus tard, 43 Émiratis ont écopé de la prison à vie pour des accusations de « terrorisme » dans un procès largement critiqué par les experts de l’ONU et les défenseurs des droits humains. Ces événements s’inscrivent dans une tendance plus large où les EAU, malgré leur modernité affichée, utilisent la législation anti-terroriste pour réprimer toute forme de dissidence, qu’elle soit réelle ou perçue.
L’ampleur de ce procès, qui concerne plus de cent personnes, pourrait être interprétée comme un message clair de la part des autorités émiraties : toute forme de contestation, qu’elle soit criminelle ou politique, sera impitoyablement réprimée. Ce type d’action vise non seulement à éliminer les menaces internes mais aussi à dissuader toute velléité de contestation parmi la population étrangère majoritaire aux Émirats.
Dans ce contexte, la question reste posée : ce procès reflète-t-il une véritable menace pour la sécurité de l’État, ou n’est-il qu’un prétexte pour renforcer le contrôle du régime sur la société émiratie ? Les réponses à cette question détermineront en grande partie l’image que les EAU souhaitent projeter au monde et la manière dont ils sont perçus par la communauté internationale.
Ce cas met en lumière les défis auxquels sont confrontés les Émirats dans leur quête pour maintenir un équilibre entre sécurité nationale et respect des droits humains, tout en rappelant que l’obsession sécuritaire peut parfois conduire à une répression excessive, voire à une instrumentalisation de la justice.