Soueida (sud de la Syrie), 15 juillet 2025 — Après plusieurs jours d’affrontements intercommunautaires sanglants, l’entrée des forces gouvernementales syriennes dans la ville druze de Soueida a plongé la région dans une spirale de terreur. Des dizaines de témoignages recueillis sur place par des ONG et des agences de presse confirment une vague de violences systématiques : exécutions sommaires, pillages de maisons, incendies criminels, détentions arbitraires, perpétrés par les forces de sécurité et leurs supplétifs bédouins.
Malgré l’annonce d’un cessez-le-feu officiel, la ville a été investie au matin du 14 juillet par des unités armées venues de Damas, censées « rétablir l’ordre ». Mais sur le terrain, ce sont des scènes d’horreur qui se sont imposées : corps abandonnés dans les rues, quartiers réduits en cendres, habitants en fuite ou terrés chez eux sans eau ni électricité.
« Ils sont arrivés avec des pick-up, armés jusqu’aux dents, ont expulsé les familles, brûlé les maisons et tiré sur ceux qui tentaient de s’échapper », témoigne un habitant de Soueida, resté anonyme par peur de représailles.
L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) et le bureau des droits de l’ONU (OHCHR) ont signalé des violations graves : exécutions sur place, kidnappings, incendies de domiciles, pillages et harcèlement de civils, attribués à des éléments liés aux ministères de l’Intérieur et de la Défense.
Le SOHR rapporte notamment que 21 civils, dont trois femmes, auraient été exécutés par les forces gouvernementales dans une maison d’hôtes, et que le bilan humain des combats avoisine les 166 morts, incluant militaires et civils.
Alors que le président intérimaire Ahmed al‑Sharaa avait annoncé un cessez‑le‑feu immédiat et annoncé le déploiement des forces nationales pour « restaurer l’ordre » à Soueida, les violences se sont intensifiées dès leur entrée dans la ville, accompagnées de combattants bédouins.
Des témoins affirment que ces forces, supposées garantir la sécurité, auraient participé à des exactions contre la communauté druze. Le ministre de l’Intérieur, Noureddine al‑Baba, a soutenu que la mission visait à « protéger les civils et mettre fin au chaos », mais cela contraste avec les récits d’atrocités rapportés sur le terrain.
Le conflit a débuté après l’enlèvement le 11 juillet d’un commerçant druze par des membres d’une tribu bédouine sur l’autoroute reliant Damas à Soueida. Les représailles druzes ont immédiatement embrasé la région dans un cycle de kidnappings et affrontements mortels.
Depuis, des centaines de combattants bédouins et druzes, provenant notamment de Hama et Deir ez-Zor, se sont mobilisés, renforçant les lignes et intensifiant les affrontements.
Soueida, ville de 150 000 habitants, est désormais livrée à elle-même : des panaches de fumée s’élèvent des quartiers incendiés, privés d’eau, d’électricité et d’infrastructures de communication.
L’ONU estime que plus de 87 000 personnes ont été déplacées depuis le 12 juillet dans la province, confrontées à la pénurie, aux déplacements forcés et à l’insécurité permanente.
Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (OHCHR) a exhorté les autorités syriennes à enquêter sur ces exactions et à traduire en justice les responsables des abus, notamment après l’exécution de 13 personnes lors d’un rassemblement familial le 15 juillet.