Le récent communiqué du ministère de la Défense nationale (MDN) décrivant l’exercice tactique supervisé par le Général d’Armée Saïd Chanegriha dans le Secteur opérationnel Nord-Est In Amenas, au cœur de la 4ème Région militaire, se présente comme une ode au professionnalisme et à la puissance de l’Armée nationale populaire (ANP). Cependant, une lecture attentive révèle un discours calibré, où la glorification institutionnelle l’emporte sur la transparence et la pertinence dans un contexte national complexe.
Le communiqué multiplie les termes élogieux : « professionnalisme élevé », « parfaite coordination », « précision des tirs » ou encore « maîtrise des systèmes d’armes modernes ». Ces formules, bien que flatteuses, restent vagues et dépourvues de substance vérifiable. Quels étaient les critères objectifs pour évaluer la « performance générale » des unités ? Quels défis spécifiques ont été surmontés lors de cet exercice avec « munitions réelles » ? En l’absence de détails concrets, le texte ressemble davantage à une opération de communication qu’à un compte-rendu factuel. Cette opacité donne l’impression d’une mise en scène destinée à projeter une image d’invincibilité, sans permettre au public de juger de la réelle efficacité des opérations.
L’accent mis sur la « rigueur dans la planification » et la « disponibilité au combat » contraste avec les réalités économiques et sociales de l’Algérie. Le pays, toujours dépendant des revenus des hydrocarbures, fait face à une crise économique persistante, avec des secteurs vitaux comme la santé et l’éducation en mal de financement. Dans ce contexte, le coût d’un exercice tactique d’envergure, impliquant des munitions réelles et la mobilisation de moyens terrestres et aériens, soulève des questions. Le communiqué passe sous silence les ressources engagées, laissant planer le doute sur la pertinence de telles dépenses face aux besoins pressants de la population. Une communication plus transparente aurait pu justifier l’importance stratégique de cet exercice, mais le MDN préfère le silence sur ce point.
Le récit du MDN place le Général d’Armée Saïd Chanegriha au centre de l’événement, dépeint comme une figure omniprésente supervisant chaque détail, félicitant les troupes et passant en revue les unités. Cette focalisation sur l’individu, au détriment d’une valorisation collective de l’institution, renforce une vision hiérarchique où la figure du chef prime sur l’ensemble. Une telle personnalisation pourrait masquer des faiblesses structurelles au sein de l’ANP, comme des lacunes dans la formation des troupes ou des tensions internes, qui ne trouvent jamais d’écho dans ce type de discours officiel. En outre, cette approche risque de réduire l’exercice à une démonstration de loyauté envers une figure plutôt qu’à une évaluation objective des capacités opérationnelles.
L’exercice d’In Amenas aurait pu être l’occasion de démontrer une vision moderne et transparente de la défense nationale, en phase avec les attentes d’une société algérienne en quête de clarté et de responsabilité. Au lieu de cela, le communiqué s’inscrit dans une logique d’autocélébration, où l’ANP est présentée comme une entité infaillible, sans failles ni limites. Cette posture ne laisse aucune place à un débat sur les priorités stratégiques ou sur l’équilibre entre les impératifs de sécurité et les besoins socio-économiques du pays.
