L’Algérie rejette la plainte déposée par le Mali auprès de la Cour internationale de Justice (CIJ) concernant la destruction d’un drone malien dans la région de Tinzawatène, dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025. Le gouvernement algérien a qualifié cette démarche de Bamako de « manipulatrice » et de tentative d’instrumentalisation du droit international.
Le Mali accuse l’Algérie d’agression et de violation du principe de non-recours à la force, affirmant que la destruction du drone immatriculé TZ-98D constituait un acte « hostile et inamical » contre sa souveraineté aérienne. Bamako dénonce également le refus d’Alger de fournir des preuves relatives à la violation présumée de son espace aérien.
La CIJ a transmis les documents de la plainte à l’Algérie, tout en précisant qu’aucune procédure ne pourrait être engagée tant que le pays n’accepterait pas la compétence de la Cour. Alger a fermement rejeté les accusations, qualifiant la démarche malienne de « manœuvre flagrante et dénuée de crédibilité » et soulignant le paradoxe pour le Mali : un État dirigé par une autorité issue d’un putsch, qui a bafoué sa propre légitimité constitutionnelle, se prétendant gardien du droit international.
Critique de la posture algérienne
Si la position de l’Algérie peut être comprise comme un exercice de souveraineté et un refus de céder à ce qu’elle considère comme des pressions politisées, cette stratégie n’est pas sans limites ni conséquences. En refusant de comparaître devant la CIJ, Alger ferme la porte à un règlement pacifique et juridique du différend, renforçant la perception d’un pays qui choisit le blocage diplomatique plutôt que le dialogue. Cette posture pourrait être interprétée comme un manque de transparence et une incapacité à gérer les tensions régionales de manière constructive.
De plus, le refus algérien alimente les tensions avec les voisins du Sahel et fragilise la coopération sécuritaire régionale. L’espace aérien mutuellement fermé, les rappels d’ambassadeurs et les blocages diplomatiques constituent autant d’obstacles à la coordination contre les menaces transfrontalières et le terrorisme. Sur le plan politique, cette attitude renforce l’isolement régional de l’Algérie et fragilise sa crédibilité internationale, alors même qu’elle se pose en arbitre de la sécurité au Sahel.
L’impasse autour du drone malien exacerbe la fragilité de l’Alliance des États du Sahel (AES) et met en lumière les limites des mécanismes diplomatiques régionaux. Alors que le Mali persiste dans sa démarche politisée, l’Algérie, en refusant de répondre juridiquement, risque de transformer un différend ponctuel en crise durable, avec des répercussions sur la stabilité frontalière, la sécurité aérienne et la coopération militaire.
Par ailleurs, cet épisode illustre une faiblesse structurelle dans la gouvernance régionale : ni Bamako ni Alger ne semblent disposés à privilégier la négociation ou la médiation neutre. Le recours à la CIJ, instrumentalisé par le Mali et rejeté par l’Algérie, devient un champ de bataille diplomatique où les principes du droit international sont subordonnés aux stratégies politiques et aux postures de souveraineté.
En définitive, l’affaire du drone malien souligne l’urgence d’une approche régionale plus pragmatique, capable de dépasser les postures rigides et les rivalités historiques. La stabilité du Sahel, déjà menacée par les crises sécuritaires et politiques, dépendra de la capacité des États concernés à rétablir le dialogue et à éviter l’escalade, plutôt que de s’enfermer dans des stratégies de refus et de confrontation devant les instances internationales.