Moins de quarante-huit heures après l’annonce d’un cessez-le-feu censé ramener le calme entre le Pakistan et l’Afghanistan, les armes ont de nouveau parlé. Vendredi soir, plusieurs frappes aériennes pakistanaises ont visé la province afghane de Paktika, notamment les districts d’Argoun et de Barmal, selon des sources talibanes et des médias locaux. Ces attaques auraient touché des zones résidentielles, faisant plusieurs morts et blessés parmi les civils, dont des enfants.
L’accord de trêve, conclu deux jours plus tôt après une semaine d’affrontements meurtriers à la frontière, devait initialement durer 48 heures avant d’être prolongé jusqu’à la fin des négociations prévues à Doha. Mais dès la soirée du vendredi 17 octobre, Kaboul a accusé Islamabad d’avoir rompu unilatéralement le cessez-le-feu.
Selon un responsable taliban cité par France 24, « le Pakistan a bombardé trois localités de la province de Paktika. L’Afghanistan ripostera ». D’après un hôpital local, au moins dix civils — dont deux enfants — ont été tués et douze autres blessés. La fédération afghane de cricket a confirmé la mort de huit joueurs présents dans la région pour un tournoi, hébergés dans une auberge détruite par une frappe.
À Islamabad, le ministre pakistanais de la Défense, Khawaja Asif, a tenu des propos particulièrement virulents à l’encontre de Kaboul. « Le Pakistan ne peut plus entretenir les mêmes relations avec l’Afghanistan qu’auparavant », a-t-il déclaré, exigeant le retour de tous les réfugiés afghans sur leur sol d’origine.
Il a averti que « toute source de terrorisme visant le Pakistan en paierait le prix », accusant les talibans de laisser opérer sur leur territoire des groupes hostiles à Islamabad, notamment le Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP). Dans un ton accusatoire, Asif a même évoqué une collusion entre Kaboul et l’Inde, parlant d’un « complot dirigé contre le Pakistan ».
Les affrontements récents trouvent leur origine dans les explosions survenues à Kaboul le 11 octobre, que les autorités talibanes ont attribuées au Pakistan. Depuis, les échanges de tirs ont causé plusieurs dizaines de morts parmi les soldats et civils des deux camps. Les talibans affirment avoir tué 58 militaires pakistanais, tandis qu’Islamabad déclare avoir perdu 23 hommes et « neutralisé » plus de 200 combattants talibans.
Malgré les appels à la retenue de la Mission d’assistance des Nations unies en Afghanistan (MANUA), qui fait état de 37 morts et 425 blessés civils en moins d’une semaine, la frontière reste le théâtre d’une escalade inquiétante.
Alors que les délégations des deux pays doivent se retrouver à Doha pour tenter de rétablir le dialogue, les perspectives de paix paraissent s’éloigner. La méfiance entre Kaboul et Islamabad, nourrie par des décennies d’accusations mutuelles et de rivalités frontalières, semble plus profonde que jamais.
La reprise des frappes, au lendemain même d’un cessez-le-feu, illustre l’extrême vulnérabilité d’une trêve où chaque partie cherche davantage à affirmer sa force qu’à construire la paix.Une fois encore, ce sont les civils, piégés entre deux armées, qui en paient le prix le plus lourd.