Le ministre libyen de l’Éducation, Ali al-Abed, a été placé en détention préventive samedi soir par le parquet libyen, accusé de négligence dans la distribution des manuels scolaires, laissant des millions d’élèves dans l’incertitude au début de l’année scolaire 2025-2026. Cette arrestation intervient moins d’un an après la condamnation de son prédécesseur, Moussa al-Megarief, qui avait écopé de trois ans et demi de prison pour des faits similaires.
Selon un communiqué officiel du bureau du procureur général, l’enquête vise Ali al-Abed ainsi que le chef du département des programmes scolaires du ministère pour « atteinte à l’intérêt public et violation du droit à l’éducation ». Les procureurs ont souligné que l’enquête portait sur l’attribution des contrats d’impression des manuels scolaires et avait mis en lumière de graves « irrégularités dans les procédures administratives et financières ». Ils ont également pointé du doigt le « manquement à l’obligation de fournir les manuels à temps à deux millions d’élèves », privant ainsi de nombreux enfants d’un droit fondamental à l’éducation.
Cette crise survient dans un contexte déjà fragile pour le système éducatif libyen. L’année scolaire a démarré avec plus d’un mois de retard, obligeant les parents à financer eux-mêmes des photocopies pour permettre à leurs enfants de suivre les cours. Dans le pays, les manuels scolaires sont normalement fournis gratuitement dans toutes les écoles publiques jusqu’à la fin du secondaire, grâce à une enveloppe spéciale du budget du ministère de l’Éducation. La répétition de ce type de scandales soulève de sérieuses questions sur l’efficacité de la gouvernance au sein du ministère et sur la capacité des autorités à garantir l’accès à l’éducation pour tous.
Les réactions de la société civile et des parents ont été immédiates et véhémentes. Les réseaux sociaux libyens ont rapidement relayé des témoignages de familles contraintes de dépenser des sommes importantes pour photocopier les manuels scolaires de leurs enfants. De nombreux enseignants, eux aussi pris au dépourvu, ont dénoncé le chaos administratif et l’impact direct de ces manquements sur la qualité de l’enseignement.
L’affaire Ali al-Abed illustre un problème récurrent en Libye : la fragilité des institutions publiques et la persistance des dysfonctionnements bureaucratiques, qui continuent de mettre en péril les droits fondamentaux des citoyens, et en particulier celui des enfants à une éducation digne et régulière. La succession de ministres de l’Éducation arrêtés pour des affaires similaires révèle un cycle inquiétant d’impunité et de mauvaise gestion, mettant en lumière l’urgence d’une réforme profonde et durable du système éducatif libyen.
Alors que l’enquête se poursuit, la détention d’Ali al-Abed est perçue comme un signal fort envoyé par le parquet aux responsables gouvernementaux : la négligence administrative, lorsqu’elle affecte la vie de millions de jeunes Libyens, ne sera plus tolérée. Mais la question demeure : cette mesure suffira-t-elle à rompre le cycle de crises qui handicape l’éducation dans le pays depuis des années ?


























