Coup de tonnerre sur les marchés énergétiques mondiaux : les prix du pétrole viennent d’atteindre leur plus bas niveau depuis la pandémie de 2020. En cause, une escalade spectaculaire de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, orchestrée par Donald Trump, dont les effets dépassent largement le cadre bilatéral initial. En toile de fond, une Russie déjà affaiblie par sa guerre en Ukraine voit ses revenus pétroliers chuter dangereusement, malgré le fait qu’elle n’ait pas été directement visée par les nouvelles taxes américaines.
Tout s’est accéléré le 7 avril, lorsque Donald Trump a annoncé une surtaxe de 50 % sur les importations chinoises, s’ajoutant à une précédente vague de hausses tarifaires. Pékin a aussitôt répliqué avec des droits de douane de 34 %, accentuant l’effet domino sur l’économie mondiale. Résultat immédiat : le Brent est tombé à 60,36 dollars le baril, et le WTI à 57,04 dollars, leur plus bas niveau depuis 2021.
Les analystes redoutent une récession mondiale qui pourrait étouffer la demande de pétrole. « La chute brutale des cours traduit les craintes d’un ralentissement global », indique un rapport d’ING, alors que Goldman Sachs a revu à la baisse ses prévisions de prix pour 2026 à 58 dollars le baril pour le Brent, voire 55 dollars pour le WTI.
Face à cette tempête, l’OPEP+, qui avait récemment surpris les marchés en annonçant une augmentation plus importante que prévu de sa production pour mai, pourrait faire volte-face. La hausse de l’offre intervient au pire moment, alimentant une surabondance et renforçant la pression baissière sur les prix.
Mais c’est la Russie qui semble la plus durement touchée par cette nouvelle configuration. Le Kremlin avait bâti son budget 2025 sur un baril à 70 dollars. Or, le prix du brut russe (Urals) a chuté à 51,54 dollars. Ce niveau critique menace directement les recettes de l’État, alors que 32 % du budget russe est consacré à l’effort de guerre en Ukraine.
Ironie du sort : bien que la Russie n’ait pas été ciblée par les sanctions commerciales américaines récentes, elle en subit les contrecoups les plus sévères. La baisse généralisée du prix du brut, provoquée par la crainte d’un ralentissement mondial et la guerre tarifaire, érode dangereusement les marges de manœuvre budgétaires du Kremlin.
Selon l’économiste Wojciech Jakobik, « la Russie aura de plus en plus de mal à financer sa guerre et ses dépenses sociales si les prix du pétrole restent sous les 70 dollars. Cela pourrait forcer Moscou à rechercher un cessez-le-feu plus rapidement ». À cela s’ajoutent les sanctions occidentales de janvier, qui ont ralenti les exportations russes via sa « flotte fantôme », et la dépendance croissante vis-à-vis de la Chine, elle-même affaiblie par la guerre commerciale avec Washington.
Les perspectives restent sombres. Si la production continue d’augmenter au rythme actuel – notamment avec le retour en force du Kazakhstan – et si la croissance mondiale ralentit sous l’effet des guerres commerciales, les analystes n’excluent pas un retour des cours à 40 dollars le baril. Une situation intenable pour la Russie, mais aussi pour de nombreux pays producteurs.