Pour la première fois, l’Algérie a été témoin, au cours des derniers jours, d’opérations massives d’émigration illégale collective, soutenues par le régime militaire au pouvoir, vers l’Italie et l’Espagne. Ces événements ont suscité un vif écho, occupant une place centrale sur les réseaux sociaux, notamment parmi les jeunes qui ont choisi de tenter l’aventure pour fuir ce qu’ils décrivent comme la « grande prison algérienne ». Ce qui a particulièrement attiré l’attention, c’est la forte présence de mineurs et d’enfants algériens parmi ces migrants, prêts à risquer leur vie dans une aventure périlleuse. Cela soulève de nombreuses questions sur les motivations et les raisons qui poussent ces jeunes à entreprendre un voyage aussi dangereux.
Peut-on considérer ces scènes comme le reflet du désespoir et de la frustration qui touchent une partie de la société algérienne ? Elles mettent également en lumière les pressions sociales et économiques qui incitent les mineurs et les jeunes à chercher des opportunités à l’étranger, même au péril de leur vie. Ces images, qui s’inscrivent dans la continuité de nombreux précédents, confirment que les conditions de vie en Algérie sont devenues insupportables. Les jeunes Algériens ont perdu tout espoir d’amélioration de leur situation face à l’emprise croissante du pouvoir militaire et à l’accaparement des ressources économiques par les généraux et une élite opportuniste. Par ailleurs, le peuple algérien souffre d’une répression quotidienne et de violations de ses droits fondamentaux, ainsi que d’un manque d’accès aux opportunités les plus élémentaires pour une vie digne.
De récentes études ont révélé des chiffres alarmants sur la détérioration du niveau de vie des Algériens, confrontés à la pauvreté et à l’incapacité économique, particulièrement depuis 2019. Selon une enquête du ministère algérien de la Solidarité nationale, de la Famille et des Questions féminines, plus de 70 % des familles algériennes peinent à couvrir leurs dépenses. Les chiffres récents du même ministère montrent une augmentation notable de la pauvreté et de la précarité parmi les citoyens. Le nombre de pauvres en Algérie est passé de 1,04 million en 2019 à 5,1 millions en 2024. Le ministère définit la pauvreté comme l’incapacité à répondre aux besoins de base, qu’ils soient alimentaires ou non.
Selon ce même rapport, 70,1 % des familles algériennes déclarent couvrir leurs dépenses avec difficulté, tandis que seulement 13,6 % y parviennent sans problème. De plus, 75,1 % des chefs de famille estiment que leur niveau de vie s’est détérioré par rapport à la période précédant la pandémie de Covid-19. Les rapports algériens confirment que 6,3 millions d’Algériens vivent désormais sous le seuil de pauvreté, dans un contexte de dégradation continue de leur situation ces dernières années. Cette situation est attribuée aux politiques gouvernementales qui favorisent les intérêts des riches, au détriment des citoyens ordinaires. La montée du coût de la vie et des prix a épuisé les Algériens, tandis que la confiance en les institutions s’effrite à tous les niveaux.
L’aggravation de la pauvreté, du chômage et de la corruption, combinée à l’enrichissement d’une classe de généraux bénéficiant de privilèges facilités par le gouvernement, alimente le mécontentement et la frustration. Face à cette réalité, de nombreux citoyens, accablés par ces conditions, envisagent désormais de fuir l’Algérie.