17 septembre 2025 – L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a confirmé qu’un tragique naufrage survenu le week-end au large de Tobrouk, dans l’est de la Libye, avait coûté la vie à au moins 50 réfugiés soudanais. L’embarcation pneumatique transportant 75 migrants avait pris feu alors qu’elle tentait de rejoindre la Grèce depuis cette région contrôlée par le maréchal Khalifa Haftar. Parmi eux, 24 personnes ont été secourues et ont reçu des soins médicaux d’urgence, certaines nécessitant un transfert vers des structures spécialisées. Le sort du 51ᵉ passager demeure inconnu.
Ce drame s’inscrit dans une série de tragédies en Méditerranée centrale, la route maritime la plus meurtrière au monde. Selon l’OIM, entre le 1er janvier et le 13 septembre 2025, 456 personnes ont péri et 420 autres sont portées disparues sur cet itinéraire. Par ailleurs, plus de 17 400 migrants, dont 1 516 femmes et 586 enfants, ont été interceptés et renvoyés en Libye depuis le début de l’année.
Au-delà des dangers en mer, les migrants en Libye sont confrontés à des conditions inhumaines dans les centres de détention. Début septembre 2025, l’ONG Refugees in Libya a publié des images choquantes du centre d’Al-Boutnan à Tobrouk, révélant des cellules surpeuplées et insalubres. Les migrants y sont privés de nourriture, d’eau potable et de soins médicaux. Les vidéos, montrent des réfugiés entassés, allongés à même le sol sans matelas ni couvertures, et un homme menotté à une fenêtre, forcé de rester debout toute une nuit.
Omar (pseudonyme), un réfugié soudanais récemment libéré après avoir payé une rançon, témoigne d’un quotidien marqué par la malnutrition, la chaleur étouffante, l’air irrespirable et des maladies comme la gale, les poux ou les infections respiratoires. Les violences physiques sont omniprésentes : les gardes frappent avec des barres de métal ou tout objet à portée de main, même pour des gestes anodins comme demander de l’eau ou du pain. L’homme torturé à la fenêtre avait été puni pour avoir refusé de déverrouiller son téléphone.
En Libye, la libération des migrants est monnayée. Selon Omar, les Soudanais doivent payer 2 500 dinars libyens (environ 390 €) pour être relâchés, tandis que d’autres nationalités, comme les Tchadiens, Éthiopiens ou Yéménites, se voient exiger jusqu’à 7 000 dinars (environ 1 100 €). Ces sommes, souvent réunies grâce à l’aide familiale, s’ajoutent aux frais déjà exorbitants payés aux passeurs pour le voyage.
Depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est plongée dans un chaos politique, divisée entre le Gouvernement d’unité nationale à l’ouest, reconnu par l’ONU, et la Chambre des représentants à l’est, soutenue par Haftar. Dans ce contexte d’instabilité, les migrants sont pris en étau entre milices, trafiquants et forces de sécurité. Les centres de détention, censés être des lieux de transit, sont devenus des zones de non-droit où règnent l’impunité et la violence institutionnalisée.
Malgré les alertes répétées des ONG, la communauté internationale reste largement inactive. Dès 2023, Médecins sans frontières dénonçait l’extorsion et les mauvais traitements dans ces centres, plaidant pour l’ouverture de corridors humanitaires. Pourtant, les drames persistent, en mer comme sur terre. « Nous ne sommes pas des criminels. Nous ne cherchons qu’à survivre », déclare Omar, résumant le désespoir de milliers de migrants piégés en Libye.
Entre naufrages meurtriers et tortures quotidiennes, la Libye est devenue un piège mortel pour les migrants, un carrefour de souffrance où la vie humaine semble dénuée de valeur.