L’opposante farouche au président Kais Saied, Abir Moussi, a déposé sa candidature à l’élection présidentielle du 6 octobre 2024, malgré son emprisonnement depuis l’automne 2023. Cette démarche, réalisée par l’intermédiaire de ses avocats, souligne la persistance de Moussi à défier un système politique de plus en plus autoritaire.
Abir Moussi, cheffe du Parti destourien libre (PDL), se revendique de l’héritage des anciens présidents autocratiques Habib Bourguiba et Zine El Abidine Ben Ali. Son parcours politique, marqué par une critique virulente du président Saied et du parti islamo-conservateur Ennahdha, montre sa détermination à rétablir un régime plus stable et centralisé. Son arrestation le 3 octobre 2023, alors qu’elle tentait de déposer des recours contre des décrets présidentiels, illustre les tensions croissantes entre le pouvoir en place et ses opposants.
Le dépôt de candidature de Moussi, bien que symbolique, se heurte à des obstacles considérables. Les critères d’acceptation à l’élection présidentielle sont rigoureux : obtenir le parrainage de dix parlementaires ou de 40 présidents de collectivités locales, ou encore réunir 10 000 signatures d’électeurs avec au moins 500 signatures par circonscription. Ces conditions sont particulièrement difficiles à remplir, surtout dans un contexte où les soutiens institutionnels sont largement acquis à Kais Saied.
L’arrestation de Moussi n’est pas un cas isolé. D’autres figures de l’opposition, comme Issam Chebbi et Ghazi Chaouachi, ont également été emprisonnées sous des accusations de complot contre l’État. Leur incapacité à obtenir une procuration spéciale pour participer à la procédure électorale met en lumière les entraves systématiques à la liberté de se présenter.
Les candidats potentiels, tels que Nizar Chaari, Kamel Akrout et Abdellatif Mekki, ont dénoncé des entraves à leur liberté de candidature. Ces restrictions sont perçues comme des tentatives de monopolisation de l’espace politique par le président Saied, utilisant les ressources de l’État pour favoriser sa réélection.
La situation en Tunisie a suscité des préoccupations parmi les organisations de défense des droits de l’homme. Une trentaine d’ONG, dont la Ligue tunisienne des droits de l’homme, ont dénoncé des « arrestations arbitraires » de candidats et une autorité électorale ayant « perdu son indépendance ». Ces critiques soulignent un environnement de plus en plus répressif, où la liberté d’expression et la participation politique sont sévèrement limitées.
La candidature d’Abir Moussi, malgré son emprisonnement, représente un acte de résistance significatif contre l’autoritarisme croissant en Tunisie. Cependant, les obstacles institutionnels et la répression systématique des opposants politiques posent de sérieux défis à la tenue d’une élection présidentielle libre et équitable. La situation actuelle met en lumière la fragilité de la démocratie tunisienne, alors que le pays se prépare à une élection cruciale pour son avenir politique.