Le pouvoir syrien, fraîchement installé, proclame l’organisation, du 15 au 20 septembre 2025, d’un scrutin indirect pour constituer une Assemblée transitoire de 210 membres. Mais derrière cette transition institutionnelle aux allures de renouveau, c’est l’exclusion criante du peuple syrien du processus décisionnel qui scandalise. Une fois de plus, le mirage d’une réforme démocratique dissimule à peine la perpétuation d’un autoritarisme insidieux.
Car il ne s’agit pas d’élections ouvertes, transparentes et représentatives. Il ne s’agit pas d’un moment de souveraineté populaire, mais d’une mise en scène politique, dirigée de bout en bout par l’exécutif. Sur les 210 sièges, 140 seront attribués par des comités locaux nommés, eux-mêmes issus de cercles proches du pouvoir, et les 70 autres seront directement désignés par le président par intérim, Ahmad al-Sharaa. Le peuple syrien ? Il observe, il subit, mais il ne choisit pas.
Cette architecture pseudo-électorale est le reflet d’un régime de transition qui verrouille le débat au lieu de l’ouvrir, et qui prétend incarner l’unité nationale tout en marginalisant les voix discordantes. La déclaration constitutionnelle provisoire, imposée en mars sans consultation populaire, offre cinq ans de pouvoir sans partage à un président issu des rangs islamistes, dont l’autorité n’a jamais été soumise au vote universel.
Les critiques sont nombreuses. Les composantes ethniques et religieuses du pays — Kurdes, Alaouites, Chrétiens, Druzes — sont absentes des cercles de décision. Le quota de 20 % imposé aux femmes dans les organes électoraux n’est qu’un cache-misère symbolique, sans prise sur la réalité du pouvoir. Et pendant que l’on proclame l’avènement d’une ère nouvelle depuis Damas, les régions périphériques continuent de vivre sous la menace des milices, des représailles armées, et des règlements de compte post-Assad.
Le simulacre électoral de septembre est un exercice de légitimation, pas de libération. Le régime veut se donner une façade constitutionnelle et institutionnelle pour mieux se réinsérer dans le concert des nations, mais il refuse toujours l’essentiel : le droit du peuple syrien à décider librement de son avenir. Aucun mécanisme de contrôle indépendant, aucune mission internationale d’observation, aucune ouverture réelle à l’opposition politique n’est à l’ordre du jour.
En réalité, cette Assemblée annoncée ne sera qu’un instrument docile, façonné pour entériner les choix du président, légiférer sur commande, et prolonger l’illusion d’un État refondé. Il ne s’agit pas d’une transition démocratique, mais d’une reconduction du pouvoir, dans une version rénovée, plus subtile, mais tout aussi autoritaire.
Dans un pays dévasté par quatorze années de guerre, ce que réclame le peuple syrien, ce ne sont pas des comités électoraux vides de sens, mais la vérité, la justice, la mémoire, et la dignité. Ce sont des élections réelles, libres, pluralistes, sous supervision internationale. Pas un théâtre politique sous contrôle.